Après un cancer, la vie La rémission, période charnière

le suivi régulier est obligatoire après un traitement pour cancer.
Le suivi régulier est obligatoire après un traitement pour cancer. © mangostock - Fotolia.com

Ca y est, vous avez subi votre dernière séance de chimiothérapie et votre médecin vous l'annonce : vous ne le reverrez que dans trois mois, pour les examens de contrôle. Le soulagement, après ces longs mois de traitements difficiles.

Certes, mais le passage à une vie normale n'est pas si simple à négocier, ainsi qu'en témoigne Brigitte. Après un cancer que les médecins estimaient en phase terminale, elle finit par surmonter la maladie et peut sortir de l'hôpital. "Me retrouver dehors du jour au lendemain, sans traitement, même si j'avais le bonheur d'être en rémission, a été source d'angoisse et comme un saut dans le vide, se souvient Brigitte. Ensuite, alors que pour une femme être chauve semble acceptable et presque normal dans un service d'oncologie, à l'extérieur c'est difficilement supportable dans notre société. Alors paradoxalement, j'ai souffert de dépression quelques mois après avoir remporté mon combat pour ma vie." Le malade perd brusquement tous les repères et les habitudes qu'il avait prises durant les soins. Il se retrouve projeté dans la vie réelle, comme livré à lui-même.

"Il est important de prévenir le malade avant la fin du traitement de ce qui l'attend, de bien anticiper la situation avec lui, estime le Dr Sylvie Dolbeault, responsable de l'unité de psycho-oncologie de l'Institut Curie. Sinon, il est vrai que le contraste peut être violent. Beaucoup de patients nous décrivent un sentiment d'abandon. D'où l'importance de bien préparer la sortie." 

Suivi de rigueur

Paradoxalement, le combat n'est pas fini pour autant. C'est justement cette épée de Damoclès au-dessus de la tête qui rend l'après cancer difficile à vivre. Selon les pathologies, certains patients devront continuer à recevoir des soins pendant des années. C'est le cas par exemple pour certains cancers du sein, où les patients restent sous hormonothérapie bien après que le cancer ait été soigné.

"L'épée de Damoclès est toujours au-dessus de ma tête. J'attends, je tremble à chaque contrôle."

Pour les autres, il y a toujours, quoiqu'il en soit, le suivi de rigueur. Au début, les contrôles ont lieu tous les trois ou quatre mois puis s'espacent, une fois par an ou tous les deux ans. Beaucoup d'anciens malades décrivent la peur qui leur tenaille le ventre avant chaque visite chez le cancérologue, comme Marie, de Toulouse : "Je ne crois pas aux "rémissions", le cancer est toujours présent. Dès que l'on affronte "la bête", l'avenir est incertain. S'il en était autrement, pourquoi ferions-nous des contrôles réguliers ? L'épée de Damoclès est toujours au-dessus de ma tête. J'attends, je tremble à chaque contrôle. Depuis notre affrontement, j'essaie de tenir (le cancer) en respect, il gâche mon futur."

L'incertitude demeure

 "Tous ces paramètres rendent, à mon sens, indispensable le suivi par un médecin traitant", commente le Dr Françoise May-Levin. Cancérologue ex-chef de service à l'hôpital Gustave-Roussy, le Dr May-Levin est aujourd'hui bénévole à temps plein à la Ligue contre le cancer, où elle anime des ateliers de parole. "Le médecin traitant peut se révéler un véritable appui après le traitement. Mais cela implique que vous ne coupiez pas les liens avec lui pendant la maladie, sinon il se sentira exclu et, surtout, ne connaîtra pas aussi bien votre dossier pour vous aider par la suite." A l'Institut Curie, autre méthode, les patients sont souvent directement adressés au spécialiste de leur pathologie, qui les suivra ensuite régulièrement, en dehors des fréquents contrôles.

"Se faire suivre par le médecin traitant."

C'est que l'incertitude demeure bien après la tumeur. Les médecins ne parlent jamais de guérison avant cinq ans, et encore. Le mot salvateur n'est pas souvent prononcé et beaucoup de personnes qui ont eu un cancer se considèrent comme en sursis ou, en tout cas, susceptibles d'être de nouveau malades. "C'est pourquoi nous proposons un soutien psychologique au patient, explique le Dr May-Levin. Certaines personnes supportent mieux cette incertitude que d'autres, mais il est important qu'elles sachent qu'un soutien est disponible si besoin."

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