Complexes : c'est quoi, origine, comment ne plus en avoir ?
Nez, poids, ventre, taille... La liste des complexes est infinie et variable en fonction des personnes (femme, homme, ado...). Par définition, un complexe est une appréciation subjective de soi-même. Qu'est-ce que ça cache ? Chez l'homme ? La femme ? Comment surmonter ses complexes et s'accepter tel que l'on est ?
Très peu de gens, voire personne, n'est dénué de complexes. Qu'ils soient physiques, psychologiques ou sociaux, les complexes peuvent avoir de réels impacts sur l'estime personnelle. Ils sont particulièrement fréquents chez les adolescents, mais peuvent persister jusqu'à l'âge adulte. Pourquoi est-on complexé ? D'où ça vient ? Qu'est-ce que les complexes traduisent ? Et surtout, comment y faire face et les surmonter ? Eclairage du Dr Dominique-Adèle Cassuto, médecin endocrinologue, nutritionniste et auteure du livre Silhouette, mon amie, mon ennemie aux Editions La Martinière.
Définition : c'est quoi un complexe ?
Trop grosse, trop maigre, trop grande, pas de seins, trop de seins, une calvitie, des cheveux roux, des dents du bonheur, une tache de naissance... La liste des complexes est longue, voire infinie ! Un complexe, en psychologie, est un terme qui décrit un sentiment d'infériorité ou une carence dans l'estime de soi face à une caractéristique de son physique par exemple. "Le mot "complexe" est utilisé dans le langage courant, indépendamment de sa signification scientifique, pour désigner un sentiment ou un état d'infériorité dans la vie personnelle, affective ou sociale", peut-on lire dans le Larousse Médical. Outre les complexes physiques, il y a les complexes psychologiques ou sociaux. Cela peut être le fait de se sentir moins intelligent que les autres, d'avoir le sentiment d'avoir un métier "moins prestigieux" que les autres...
Quels sont les complexes les plus fréquents chez la femme ?
Une étude publiée à l'été 2020 sur YouGov (auprès de 1 003 femmes majeures) a montré que 67% des femmes étaient complexées par leur corps. Parmi les complexes les plus fréquents chez la femme, on retrouve le ventre (pour 36%), les fesses (pour 32%) et les cuisses (pour 18%).
Quels sont les plus gros complexes de l'homme ?
Un sondage mené par le site américain Reddit (sur 5 748 hommes) a révélé que la taille du pénis, la calvitie, la présence de tétons trop apparents ou la transpiration excessive figuraient parmi les complexes les plus majeurs.
D'où viennent les complexes et que traduisent-ils ?
"Le complexe n'est pas quelque chose d'inné. Au départ, tout le monde a le même schéma corporel : on sait qu'on a deux yeux, un nez, une tête... Le complexe va se construire au fur et à mesure de la vie, généralement au cours de l'enfance ou de l'adolescence, avec les interactions que l'on a avec les autres, indique le Dr Cassuto. Il est très lié à la confiance en soi et à la comparaison sociale". Le complexe est une appréciation subjective de soi-même, d'une caractéristique qui peut être déformée par sa propre perception. On a d'ailleurs du mal à imaginer qu'une personne nous voit autrement qu'à travers ce complexe. Les complexes ne sont en théorie pas pathologiques mais peuvent le devenir, pouvant causer des troubles caractériels ou psychiques. Cela peut aller de la petite gêne à une dysmorphie (ou dysmorphophobie), un trouble mental caractérisé par une idée obsessive selon laquelle une partie de son corps, voire son corps au complet, est rempli de défauts. "Sur les réseaux sociaux, particulièrement avec la multiplication des filtres et des logiciels de retouches, le mécanisme de la comparaison et la quête du "like" conduisent à s'inquiéter démesurément du regard des autres et à développer des complexes. On va essayer de ressembler à un certain type de physique, qui semble valorisé sur les réseaux sociaux, à ce qu'on estime être la norme, ou à des idéaux de beauté qui sont bien souvent inatteignables. Or, les normes ne sont pas les mêmes dans tous les pays et évoluent en fonction des époques. La conséquence est préoccupante : on constate ces dernières années une véritable augmentation des troubles anxieux et dépressifs, particulièrement chez les adolescents", signale notre interlocutrice.
Exemples de raisons qui peuvent expliquer l'apparition d'un complexe :
- Une expérience ou situation humiliante
- Une réaction inadéquate de son entourage
- Un commentaire négatif (d'un camarade de classe, d'un professeur, d'un collègue de travail, voire même d'un inconnu dans la rue)
- La pression sociale véhiculée par la mode, les magazines, la télévision, les réseaux sociaux...
- Les différents deuils que nous avons à faire en lien quand on vieillit (le corps change, il faut apprendre à vivre avec cette nouvelle image de soi)
Comment reconnaître une personne complexée ?
De manière générale, une personne complexée :
► Cherche naturellement à dissimuler l'objet de son complexe, pensant (à tort) que c'est tout ce qu'on voit chez elle quand on la regarde. Par exemple, avec des vêtements, du maquillage, des accessoires, en marchant la tête baissée...
► Compense son sentiment de dévalorisation en développant une qualité à outrance (une générosité ou un humour excessifs par exemple). Les personnes qui ont un complexe de supériorité cachent presque toujours un complexe d'infériorité.
► Est convaincue qu'elle ne peut pas être aimée pleinement à cause de la caractéristique physique, objet de son complexe.
► A tendance à s'isoler ou à éviter les situations où son complexe pourrait être véritablement un frein (ne pas aller à la piscine, ne pas aller à la plage, au restaurant, dans une salle de sport, à un cours de danse...)
Comment surmonter un complexe ?
► Mettre en avant une autre partie de soi. Décentralisez-vous de votre complexe et regardez les choses qui pourraient vous aider à estomper ce qui vous fait complexer. Complexes que bien souvent vous êtes seul(e) à remarquer. L'idée est de se voir dans sa globalité plutôt que par petites parties. C'est une vision plus réaliste. Par exemple : dégager son front pour souligner un regard, couper ses cheveux pour sublimer un port de tête, bien choisir ses vêtements pour mettre en valeur sa taille, ses jambes... Cela va vous permettre de prendre plus en confiance en vous et d'être plus à l'aise avec votre apparence. Ce que vous vivez comme une faiblesse ou un défaut peut parfois devenir un atout.
► Lister ses qualités. Bien souvent, on laisse le pouvoir de jugement de soi aux autres. Or, apprendre à se juger positivement, est indispensable. En pratique, on peut remplir sur un carnet une liste de toutes nos qualités, jour après jour, sans demander l'avis des autres. Se demander ce que vous avez réussi aujourd'hui et grâce à quelles qualités, peut vous aider à trouver des idées. D'une façon générale, apprenez à poser un regard bienveillant sur votre vie. Vous n'avez pas fait d'études ? Oui, mais pendant ce temps vous avez pu acquérir des expériences professionnelles ou construire une vie de famille, et cela vous a tout autant nourrie.
► Travailler sur son assurance et apprendre à soutenir le regard ! Pour cela, il y un exercice pour s'entraîner à ne pas fuir le regard des autres, voire même à le soutenir : prenez un miroir et fixez la racine de votre nez sans bouger en comptant jusqu'à vingt. Progressivement, vous allez acquérir de l'assurance et vous vous sentirez mieux face aux autres.
► Anticiper les situations de jugement. Souvent les personnes complexées et/ou timides sont dotées d'une grande imagination. C'est même elle qui leur porte préjudice dans les moments difficiles en alimentant leurs angoisses. Et si plutôt que de ruminer sur un complexe, vous mettiez à profit cette imagination débordante ? Pour ça, une technique : la visualisation. Il s'agit en quelque sorte d'imaginer un événement que l'on appréhende afin de mieux le maîtriser le moment venu. Cela permet de canaliser son stress et de maîtriser son émotivité.
► Trouver une personne populaire ou médiatisée avec la même particularité que vous. Cela permet de constater que ce que vous pensez être un complexe n'est en aucun cas un frein pour être populaire.
► Changer ce qui peut être changé. Un complexe qui devient trop pesant ne doit pas être mis de côté. Parfois il peut être atténué voire supprimé avec des changements possibles et réalisables : exercices physiques, meilleure alimentation, changement de coupe chez le coiffeur, relooking, acte dentaire chez le dentiste...
Quand consulter un psy ?
En cas de souffrance profonde liée à un ou plusieurs complexes (repli sur soi, isolement, perte d'intérêt...), une consultation chez un psychothérapeute peut être bénéfique. Le dialogue permettra de dédramatiser la situation et de prendre du recul. Finalement, en parler, c'est se libérer. Et inversement, tout ce qu'on garde pour soi finit par se transformer en difficulté, voire en souffrance.
Que dire à un proche qui est complexé ?
Que ce soit un enfant, un ado ou un adulte :
► Evitez les formulations stigmatisantes du type "Ma pauvre, tu n'as pas de chance" ou "ne t'inquiète pas, ça va s'arranger", car en plus de souffrir de son complexe, la personne peut se sentir incomprise et impuissante", conseille notre interlocutrice. La plaindre ou minimiser son ressenti risquerait d'accentuer sa peine, sa gêne et par conséquent son complexe.
► Parlez de votre propre vécu, en lui expliquant qu'on a tous des particularités physiques qui nous sont propres et que c'est normal d'en avoir. "Pour un enfant ou un adolescent, vous pouvez lui montrer des photos de vous à son âge ou lui expliquer que vous non plus vous ne vous sentiez pas très bien dans votre peau puis que c'est passé naturellement. Il est important de se rappeler que ce sont ces particularités qui permettent de se construire en tant que
personne unique et qu'au fil du temps on est soi-même capable de transformer une différence en véritable qualité", explique le Dr Cassuto.
► Aidez-la à travailler son sens de la répartie et réfléchissez ensemble à des idées de réponses pour faire face à des potentielles remarques ou moqueries.
Merci au Dr Dominique-Adèle Cassuto, médecin endocrinologue, nutritionniste et auteure du livre Silhouette, mon amie, mon ennemie aux Editions La Martinière.