Atrophie hippocampique : conséquence, liens avec Alzheimer
L'hippocampe est une petite zone du cerveau. Il joue un rôle crucial dans la mémoire spatiale et la mémoire que l'on a des événements passés. L'hippocampe est aussi un marqueur précoce de la maladie d'Alzheimer. Le point avec Gaëlle Chételat, directrice de recherche à l'Inserm et spécialiste de l'imagerie cérébrale.
Définition : qu'est-ce que l'hippocampe ?
L'hippocampe est une petite partie du cerveau, de la cinquième circonvolution temporale précisément, qui se situe à l'intérieur des lobes temporaux et appartient au système limbique, nom donné à plusieurs structures du cerveau qui jouent un rôle important dans le comportement, la mémoire et certaines émotions.
Quel est son rôle ?
"L'hippocampe a un rôle crucial dans la mémoire - la mémoire des événements déjà vécus et la mémoire spatiale notamment", pose Gaëlle Chételat, directrice de recherches à l'Inserm, spécialisée notamment dans la neuro-imagerie et l'hippocampe. "L'hippocampe est également impliqué dans d'autres réseaux cérébraux, entrant ainsi en interaction avec d'autres régions du cerveau et dans ce cas, il peut jouer un rôle dans la mémoire sémantique par exemple, le savoir qu'on a du monde, sans forcément qu'il s'agisse d'un événement que l'on ait vécu personnellement. Quand cette structure est altérée, on constate des pertes de mémoire", ajoute notre experte.
Mesure du volume de l'hippocampe : norme, technique (IRM...)
L'imagerie de l'hippocampe consiste en une IRM cérébrale. Sa taille moyenne normale repose "sur des normes établis par rapport à l'âge, au sexe et au niveau d'éducation, de culture, de savoir du patient. On le calcule en terme de volume", explique la directrice de recherches. On peut être amené à mesurer l'hippocampe lorsqu'une personne consulte un spécialiste pour des troubles de mémoires, révélés lors de tests. "Lors d'une imagerie du cerveau à l'IRM, le neurologue ou le radiologue peut observer la taille de l'hippocampe, soit à l'œil nu en utilisant une échelle de cotation, soit à l'aide de logiciels automatiques qui permettent d'obtenir la taille en volume de l'hippocampe qu'on vient de scanner. On la compare ensuite aux normes", détaille Gaëlle Chételat.
Quels sont les stades ?
L'échelle de Scheltens note le stade de l'atrophie de l'hippocampe de 0, absence d'atrophie, à 4, atrophie très sévère. "On peut aussi évaluer l'atrophie de l'hippocampe sur le plan qualitatif. L'hippocampe est une structure non-homogène avec des sous-parties qui ont différents rôles – on parle par exemple de la tête et de la queue de l'hippocampe. Ces parties ne sont pas reliées au même réseau cérébral, donc, elles ne jouent pas le même rôle. En fonction de l'emplacement de l'atteinte hyppocampique, on ne constate pas les même troubles", explique la spécialiste en imagerie cérébrale. Selon Gaëlle Chételat, les analyses quantitatives et qualitatives sont complémentaires.
Atrophie des hippocampes : quelles causes ?
Il existe "une atrophie de l'hippocampe liée à l'âge", c'est à dire qu'en vieillissant, le volume de l'hippocampe diminue. Il s'agit d'une évolution normale. "Si l'atrophie est plus importante qu'elle ne devrait l'être par rapport l'âge du patient, dans ce cas, il peut s'agir d'un signe de maladie d'Alzheimer ou d'autres pathologies qui s'accompagnent d'une atteinte de l'hippocampe", précise notre experte qui souligne que "vingt à trente conditions ou maladies peuvent être accompagnées d'une atrophie de l'hippocampe". Parmi lesquelles, on peut nommer : l'épilepsie, la schizophrénie, la dépression, l'hypoxie, les encéphalites...
Quel lien avec la maladie d'Alzheimer ?
L'atrophie des hippocampes est souvent un des premiers signes de la maladie d'Alzheimer. C'est d'ailleurs cette atrophie qui entraîne les pertes de mémoire et la désorientation caractéristiques de la maladie. L'hippocampe est un biomarqueur car il s'agit d'un des marqueurs de la maladie dans ses premiers stades. "On sait qu'avoir un petit hippocampe est un facteur de risques de développer une maladie d'Alzheimer. Le risque est moins lié au fait que l'hippocampe soit plus petit au départ, mais au fait qu'il subisse une atrophie plus marquée que celle attendue pour l'âge, pour telle raison ou telle autre raison", note Gaëlle Chételat. Dans le cadre d'une maladie d'Alzheimer, mesurer la taille de l'hippocampe ne permettra pas de poser le diagnostic puisque l'atrophie de l'hippocampe n'est pas spécifique à la maladie. Toutefois, "l'imagerie cérébrale de l'hippocampe permettra d'estimer le degré d'avancement de la maladie et de prédire à court et moyen terme l'évolution clinique de la maladie", détaille notre experte. Elle ajoute : "On gagne en précision de diagnostic en s'intéressant aux sous-parties de l'hippocampe et en réussissant à zoomer sur ses sous-parties. Pour l'instant ces imageries très sophistiquées sont réalisées dans des centres très spécialisés, on ne le fait pas en routine clinique, mais c'est l'imagerie du futur".
Quels sont les traitements ?
Lorsqu'il s'agit d'une atrophie liée à une maladie comme l'épilepsie ou la dépression, c'est la maladie qu'on traite, soit la cause sous-jacente à l'atrophie de l'hippocampe. Pour une maladie neurodégénérative comme Alzheimer, il n'existe aucun traitement. "Toutefois, même si on ne guérit pas d'une maladie de cette façon, le fait de faire travailler les fonctions sous-tendues par l'hippocampe peut contribuer à la renforcer et à réduire la vitesse d'atrophie. Dans le cadre du vieillissement normal, on sait qu'on peut freiner le déclin par des méthodes préventives comme des modifications dans la façon de vivre et/ou une activité physique, cognitive et méditative", développe Gaëlle Chételat. Elle précise qu'il est également possible, via les mêmes moyens, de prévenir, ou retarder, l'apparition de troubles cognitifs.
Est-ce réversible ?
"La taille de l'hippocampe est plastique, elle peut être modifiée selon nos expériences", affirme notre experte. "Si l'hippocampe peut être modifié en fonction de l'expérience, on peut imaginer que l'hippocampe, après avoir diminué, pourra grossir de nouveau en fonction des expériences. Comme un muscle ! ", ajoute-t-elle. Dans le cadre d'une maladie pour laquelle il n'existe pas de traitements médicamenteux ou chirurgicaux pour la soigner, alors on ne pourra que freiner son évolution et, en même temps, ralentir l'atrophie de l'hippocampe.
Merci à Gaëlle Chételat, directrice de recherche à l'Inserm et spécialiste de l'imagerie cérébrale.