Un coronavirus "mutant" mortel en Chine : de quoi s'agit-il ?

Des chercheurs chinois ont créé un coronavirus "mutant", cousin du Sars-CoV-2, qui serait potentiellement mortel chez l'Homme.

Un coronavirus "mutant" mortel en Chine : de quoi s'agit-il ?
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Des chercheurs chinois de l'Université de technologie chimique de Pékin ont révélé avoir fait des manipulations de clonage sur un coronavirus découvert en 2017 sur des pangolins, pour créer en laboratoire une souche mutante de coronavirus. Ce coronavirus "cloné", cousin du Sars-CoV-2 (le virus responsable de la pandémie mondiale de Covid en 2020) est connu sous le nom de GX_P2V et aurait un taux de mortalité de 100% chez des souris "humanisées". Cette recherche a été publiée le 4 janvier 2024 sur le site de pré-publication scientifique BioRxiv, mais n'a pas encore été relue et validée par la communauté scientifique ou publiée dans une revue spécialisée. Elle doit être prise avec prudence.

Perte de poids, yeux blancs...

"Un risque de propagation chez l'Homme"

Les chercheurs ont administré cette souche mutante à des souris dites "humanisées", c'est-à-dire des souris qui ont été génétiquement modifiées pour présenter des organes ou des tissus similaires à l'humain. Le but était de voir comment ce virus, issu d'un coronavirus modifié, était capable de réagir chez l'Homme. Pendant leurs manipulations, les symptômes observés chez les souris étaient particulièrement curieux. A partir du 5e jour, les souris perdaient beaucoup de poids et le virus se propageait dans leurs poumons, leurs yeux et leurs cerveaux. Le 6e jour, elles ne pouvaient quasiment plus se déplacer, avaient tout le temps "la chair de poule", une posture voûtée et leurs yeux étaient devenus blancs. Au terme de leur expérience, les chercheurs ont vu que la totalité des souris infectées par cet agent pathogène étaient mortes en seulement 7 à 8 jours. "Le coronavirus pangolin GX_P2V lié au SRAS-CoV-2 peut provoquer une mortalité de 100 % chez les souris transgéniques humaines, potentiellement attribuable à une infection cérébrale à un stade avancé. Ceci souligne un risque de propagation du GX_P2V chez l'Homme et fournit un modèle unique pour comprendre les mécanismes pathogènes des virus liés au SRAS-CoV-2", expliquent-t-ils dans leurs travaux. 

"Les choses pourraient mal tourner"

Cette découverte divise et inquiète la communauté scientifique, craignant un potentiel déclenchement d'une nouvelle pandémie. "Je ne vois rien de vaguement intéressant qui pourrait être appris en infectant de force une race étrange de souris humanisées avec un virus aléatoire. À l'inverse, je peux voir à quel point les choses pourraient mal tourner", s'indigne sur Twitter le Pr François Balloux, expert en épidémiologie à l'Institut de génétique de l'University College de Londres, qualifiant cette étude "d'épouvantable et scientifiquement totalement inutile". Mêmes inquiétudes en France : "La balance entre ces enseignements scientifiques et le potentiel extrêmement dangereux de ces manipulations est très défavorable", a commenté Bruno Canard, directeur de recherche au CNRS et chef d'équipe réplication virale au laboratoire Architecture et fonction des macromolécules biologiques (AFMB) à Marseille dans les colonnes du Figaro.

Les chercheurs tiennent à préciser que leur modèle de souris est "relativement unique" et que leurs résultats ne peuvent pas, à date, être applicables aux êtres humains. Ces pratiques de clonage sont d'ailleurs totalement interdites en France. A noter aussi que cette étude ne semble avoir aucun lien avec l'Institut chinois de virologie de Wuhan, qui était au centre des théories sur les fuites en laboratoire entourant la pandémie de Covid-19.