Syndrome de Guillain-Barré : "C'est la descente aux enfers"

A 28 ans, Violaine découvre brutalement qu'elle est atteinte du syndrome de Guillain-Barré. Un combat contre les douleurs, la fatigue et la paralysie s'enclenche, pour toujours. Témoignage.

Syndrome de Guillain-Barré : "C'est la descente aux enfers"
© Violaine Berlinguet

Le syndrome de Guillain-Barré est une maladie neurologique auto-immune, rare, qui affecte le système nerveux périphérique. Cette affection a touché Aurélien Rousseau, le ministre de la Santé qui a partagé dans un tweet son émotion liée à la sortie du livre Patiente. Cet ouvrage retrace le parcours de Violaine contre la maladie de Guillain-Barré. Elle a accepté de nous livrer le témoignage de son histoire. En 2019, Violaine est âgée de 28 ans. Maman d'un petit garçon de 18 mois, Luca, elle alterne entre sa maternité, sa vie de couple avec son conjoint Sébastien, son travail dans une banque, et sa passion pour le dessin et la course à pied. "Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes" se remémore la jeune femme. Et puis en février, jour de la Saint-Valentin, Violaine vomit. D'abord une première fois, puis les vomissements persistent. Une fatigue extrême envahit son corps. "Je ressens des douleurs intenses à la nuque, des fourmillements partout et comme des coups de poignard dans les jambes" se souvient Violaine. En 10 jours, son état se détériore. "A l'époque, je suis effrayée par les médecins et l'hôpital donc j'attends que ça passe" avoue-t-elle. Extenuée, elle ne peut plus sortir du lit et rampe pour vomir aux toilettes. Les douleurs s'aggravent. Sa belle-mère insiste : "Tu dois appeler un médecin." On est le 20 février 2019, Ce dernier l'envoie aux Urgences. Violaine patiente plusieurs heures. Un interne en médecine frappe ses genoux avec un marteau pour tester ses réflexes.

"Je subis des vagues de souffrances nuit et jour, comme si on me sciait les jambes"

Pas de réflexe. La paralysie s'est installée. Violaine est transférée dans le service de neurologie. "A ce moment là, je ne vois pas le rapport". Le spécialiste lui fait passer un électromyogramme. Le verdict tombe : Violaine est atteinte du syndrome de Guillain-Barré. Sidérée, la jeune femme demande si elle pourra manger ce soir. "Le neurologue rigole. Je lui demande s'il peut me guérir. Il me répond que je vais devoir être patiente." Violaine est transférée en service de réanimation. "C'est la descente aux enfers. Je commence à suffoquer et on m'intube sur épuisement respiratoire." Plusieurs virus sont associés à la survenue de ce syndrome. Dans le cas de Violaine, il s'agit de l'Epstein-Barr, le virus de la mononucléose.

S'ensuit une phase d'aggravation de la paralysie et des douleurs. "Je subis des vagues de souffrances nuit et jour, comme si on me sciait les jambes. Sous antidouleurs, je vomis, je suis tout le temps fatiguée et j'ai la nausée." Son état se dégrade. "Je ne parviens plus qu'à cligner l'oeil gauche. Je suis devenue une statue du musée Grévin". On lui propose plus tard une trachéotomie. "J'ai un collier autour du cou avec un tube qui relie un trou dans ma gorge et des machines. C'est très douloureux" confie Violaine. Les soins rythment ses journées. "Je rencontre Guillaume, mon kiné, qui vient tous les jours pour éviter l'apparition d'esquarres, d'enraidissement et d'hypertonies". La famille de Violaine est très présente. "Ma mère a arrêté de travailler, mon conjoint aussi. Mon père me rend visite après son travail. J'ai très peur de la solitude. J'ai toujours quelqu'un dans la chambre". Luca peut enfin lui rendre visite. "C'est une joie et une douleur intense, il ne me reconnaît pas" se souvient Violaine.

"J'ai perdu 10 kilos en à peine 3 mois. Je ne me reconnaissais plus"

Début avril, le corps de Violaine sort peu à peu de la paralysie grâce aux traitements et à la kinésithérapie. "Un matin, je commence à bouger le pouce droit. On fête ça comme une victoire". Puis, elle récupère lentement le haut de son corps, sa tête. "Il faut savoir que récupérer sa mobilité se fait dans la douleur. Le syndrome de Gauillain-Barré affecte le système nerveux et la myéline, la gaine qui entoure les nerfs. Ce sont des nerfs qui se reconstruisent en récupérant". Généralement, les patients atteints du syndrome de Guillain-Barré récupèrent entièrement. Violaine est un cas très rare, elle fait partie des 2% de patients qui ont des séquelles à vie. 

Couverture du livre Patiente, de Violaine Vim
Couverture du livre Patiente, de Violaine Vim © Violaine Vim

Violaine est transférée en centre de rééducation après qu'on lui ait retiré la canule, le tube de la trachéotomie. Elle pèse alors 47 kilos pour 1m63. "J'ai perdu 10 kilos en même pas 3 mois". Nouvelle kiné, nouvelles séances de rééducation et premières séances d'orthophonie. "Je refuse d'accepter le statut d'handicapée, je suis dans le déni". Ancienne sportive, Violaine est une battante. "Je me bats et je passe d'un fauteuil électrique à un fauteuil manuel puis à une canne."

En octobre 2020, elle rentre chez elle. "Quand j'arrive dans ma maison, je ne me reconnais plus, je suis une étrangère chez moi." Le dessin lui permet de se réapproprier son corps. En octobre 2022, Violaine a changé de vie. "Je me lance dans la rédaction web SEO et l'illustration, ma véritable passion".

"On se croit toujours invincible" 

Aujourd'hui, quatre ans après, la jeune femme doit faire face aux séquelles dont la fatigue qui persiste. Sa marche est très limitée et elle a perdu une bonne partie de sa masse musculaire. "J'ai encore des douleurs neuropathiques très fortes, je suis toujours sous traitement et je vais devoir faire de la kiné toute ma vie. Mon autonomie est assez précaire." Violaine n'a jamais perdu ses capacités cognitives et peut compter sur l'amour de son fils et de ses proches. Elle a décidé d'écrire son histoire et de la dessiner sous la forme d'un journal de bord illustré dans son livre "Patiente", disponible depuis le 24 août 2023 aux éditions Amphora. "Je suis une rescapée, j'ai eu beaucoup de chance, relativise-t-elle. Désormais handicapée, j'ai compris qu'il fallait que j'arrête de me comparer aux "valides". Me concentrer sur le positif. Arrêter de pleurer les choses que je ne peux plus faire en regrettant ma "vie d'avant".

Merci à Violaine Vim pour son témoignage, @violaine_vim. Propos recueillis le 25 août 2023.