Après 2 ans de dépression, Marion découvre qu'elle est bipolaire : "On mettait enfin un mot sur ma souffrance"
Etats dépressifs sévères, hypomanie, crises maniaques... Au bout de deux ans, Marion découvre à 34 ans qu'elle souffre de troubles bipolaires. Témoignage.
A l'occasion de la Journée mondiale des troubles bipolaires du 30 mars 2023, nous avons rencontré Marion, 51 ans, atteinte de bipolarité. Le trouble bipolaire est une maladie psychiatrique chronique caractérisée par des troubles récurrents
de l'humeur. Après deux ans et demi de dépression, c'est à l'occasion d'une crise maniaque que le diagnostic est posé. "J'avais 34 ans, et on mettait enfin un mot sur ma souffrance. Je pensais que la dépression n'était pas vraiment une maladie mais un état de faiblesse dont on pouvait sortir avec de la volonté. J'ai tout de même mis du temps à accepter le diagnostic du trouble bipolaire" reconnaît la jeune femme avec le recul. A l'époque, elle est directrice marketing. "Mon travail me passionnait, il avait un rôle central dans ma vie. J'ai dû l'arrêter pour gérer la maladie. C'est un vrai sentiment d'échec." Sur le plan personnel, elle a vécu une séparation peu après le diagnostic mais reconnaît la chance qu'elle a de ne jamais avoir été isolée, "je peux compter sur mes amis et ma famille qui sont toujours à mes cotés".
Dépression, euphorie et crise maniaque.
La bipolarité de Marion se manifeste par des états de dépression sévères, de longues périodes d'hypomanies (euphorie) et d'états maniaques. "L'hypomanie est très agréable, c'est un état de bonne humeur mais qui fait souvent suite à des phases aiguës de dépression sévère marquées par un manque d'intérêt pour tout" explique-t-elle. La crise maniaque est une phase d'hyperexcitation et de prise de risques "comme des dépenses financières inconsidérées". "J'ai peu de souvenirs de ces périodes, comme on perd le contrôle on oublie un peu ce qui s'est passé pendant la crise maniaque" rapporte Marion. Les troubles bipolaires ont aussi un impact négatif sur le sommeil qui eux-mêmes favorisent les crises maniaques. "D'où l'importance d'avoir une bonne alimentation, de faire du sport et de dormir à des horaires réguliers."
Marion est désormais "stabilisée". Elle prend des médicaments régulateurs de l'humeur (thymorégulateurs) et des antidépresseurs. "Je suis suivie par une psychiatre depuis plusieurs années, c'est un vrai soutien dans les moments les plus difficiles et elle m'a aidée à accepter le fait que la maladie fasse partie de ma vie". Elle est affiliée à un des centres experts de la Fondation Fondamental, dédiée à la lutte contre les maladies mentales. Marion fait également partie d'un groupe de psychoéducation. "C'est l'occasion d'apprendre pleins de choses sur les troubles bipolaires afin de développer des stratégies personnelles pour composer avec et d'échanger avec d'autres patients sur nos expériences".
"Ma tante souffrait aussi de bipolarité"
Elle souffre encore de dépressions saisonnières mais souhaite insister sur le fait que la maladie a changé sa façon d'appréhender le monde. "J'ai évolué de façon positive, j'étais une personne dure et loin de ses émotions. Aujourd'hui, je suis plus ouverte et bienveillante notamment grâce au travail de psychothérapie et de méditation de pleine conscience". Par contre, elle déplore le tabou qui règne souvent dans la société et même au sein des familles quant aux troubles psychiatriques. "Je savais que la sœur de ma mère souffrait également de troubles bipolaires. Comme ces troubles peuvent avoir un aspect héréditaire, cela a permis de faire le lien entre le cas de ma tante et mes épisodes de dépression". Elle souhaite insister sur la complexité de la maladie, souvent réduite à de simples sautes d'humeur. "C'est une maladie qui fait beaucoup souffrir. On stigmatise souvent les maladies psychiatriques et les troubles bipolaires et on définit les personnes atteintes par leur maladie. Oui j'ai un trouble bipolaire, mais je ne suis pas que ça" regrette Marion qui rappelle que, bien entouré et sous traitement, "la vie est pratiquement normale".
Merci à Marion pour son témoignage.