"Il n'y a pas que les grains de beauté à surveiller"

Le 26 mai, vous pourrez montrer gratuitement votre peau à un dermatologue. Comment reconnaître un mélanome débutant ? Quels sont les facteurs de risque ? Conseils du Dr Blanchet-Bardon, dermatologue.

"Il n'y a pas que les grains de beauté à surveiller"
© goodluz - 123 RF

Parmi les cancers de la peau, les plus fréquents sont les carcinomes, relativement faciles à traiter. Les mélanomes malins, qui représentent quant à eux environ 10 % des cas, sont plus sévères et de moins bon pronostic. Après une augmentation rapide du nombre de mélanomes en France ces dix dernières années, il semblerait toutefois que l'on observe enfin une stagnation du nombre de cas. Dans son dernier rapport, l'Institut national français du cancer (Inca) fait cependant état de 14 325 cas de mélanomes de la peau pour l'année 2015 et de 1773 décès. C'est le 10e cancer le plus fréquent.

Dépisté tôt, un mélanome se traite bien. "Quand on diagnostique un petit mélanome, on l'enlève et c'est fini, on n'en n'entend plus parler !", nous explique le Dr Claudine Blanchet-Bardon, vice-présidente du Syndicat des dermatologues-vénéréologues (SNDV). D'où le message répété chaque année, à l'occasion de la journée nationale de prévention et de dépistage des cancers de la peau : consulter régulièrement, une fois par an, un dermatologue.

L'occasion de montrer vos grains de beauté. Mais pas que. "C'est une idée reçue ancrée dans l'esprit du grand public, mais il faut savoir que de nombreux cancers de la peau ne sont pas des grains de beauté, insiste la dermatologue. Les carcinomes par exemple peuvent se présenter sous la forme de boutons squameux [avec des croûtes, NDLR]. Il y a aussi le cas des mélanomes achromiques, particulièrement dangereux, qui ressemblent à des boutons incolores. Par ailleurs, si le nombre de grains de beauté est un indicateur du risque de mélanome, il n'est pas le seul. "Ce qui doit surtout alerter, explique la dermatologue, ce sont les apparitions de nouvelles lésions sur la peau."

En revanche, l'idée selon laquelle nous disposons d'un capital soleil, qui une fois épuisé, nous expose davantage au risque de cancer de la peau, est tout à fait justifiée. De même qu'un nombre élevé de coups de soleil pendant l'enfance contribue à augmenter le risque de cancer de la peau. Un peu à la manière d'un "permis à points", il faut donc savoir l'économiser. D'où l'importance de bien protéger les enfants avec des crèmes solaires à indice de protection élevée, dès lors qu'ils sortent en plein air. Mais surtout de leur laisser un t-shirt, plutôt de couleur foncée, lorsqu'ils jouent sur la plage ou qu'ils se baignent. "C'est la mesure la plus efficace, mais aussi plus économique."

Les personnes avec les peaux pâles et les yeux clairs, ainsi que celles qui ont des antécédents (cas familiaux de cancer de la peau), sont les plus à risque. Mais aussi les personnes qui travaillent à l'extérieur, comme les agriculteurs ou les employés du BTP. "A cela, il faut ajouter les personnes qui ont des activités de loisirs régulières en extérieur, telles que la voile, le golf et la randonnée". Il n'y a pas que sur la plage qu'il faut mettre de l'écran total. Le week-end ou les jours de RTT, aussi. Notamment, quand on reste longtemps dehors. Selon la dermatologue, "jardiner c'est très bien, mais tondre sa pelouse torse nu, cela n'est pas raisonnable !"  Rappelons enfin que les personnes mates doivent elles aussi se protéger, car un coup de soleil sur la paume des mains ou sur la plantes des pieds peut être dangereux.

Les jeunes, accros aux cabines. Demander à son ado de mettre de la crème solaire, c'est un peu comme l'inciter à manger sain... Pas simple. Mais ce qui inquiète surtout les dermatologues, c'est leur utilisation croissante des cabines UV. Même si elles sont interdites aux mineurs, il n'empêche qu'à 18 ans, on est encore jeune. "Leurs propriétaires les attirent avec des offres discount, en espérant les rendre accro, s'emporte Claudine Blanchet-Bardon. Cela marche d'ailleurs bien, y compris auprès des plus défavorisés socialement, parce qu'être bronzé, c'est comme un signe extérieur de richesse." La dermatologue n'hésite pas à parler de "scandale sanitaire" et déplore l'inaction du gouvernement dans ce dossier. Outre les risques de mélanome, le "soleil en boîte" est aussi responsable du vieillissement précoce de la peau, rappelle encore la dermatologue. "Un vieillissement qu'aucune injection ne peut réparer."

  • Plus d'infos : consulter la liste des centres de dépistage en France sur le site www.dermatos.fr, via le numéro vert 0806 80 2016, ainsi que par le biais de l'application gratuite "SoleilRisk", téléchargeable sur l'ensemble des smartphones et tablettes Apple et Androïd.