Un collégien exclu d'un voyage scolaire en raison de son diabète
Un jeune diabétique ne pourra pas participer à un échange scolaire en Allemagne, prévu fin mai. Une discrimination que dénoncent ses parents et l'association des jeunes diabétiques.
Christine Pantani est en colère. Son fils de 13 ans, Gabriel, ne pourra pas participer à un voyage scolaire en Allemagne, prévu du 22 au 31 mai prochain. "La décision est prise, nous avons reçu un courrier défavorable et définitif." Argument avancé : le proviseur allemand y serait opposé afin de ne pas "engager la responsabilité de la famille d'accueil et des professeurs". "Nous n'avons aucune preuve de cela, poursuit-elle. Et quand bien même cela serait vrai, cela ne m'étonne pas étant donné l'absence de préparation et d'anticipation de l'équipe éducative." Car ce qui surprend surtout cette maman, c'est que l'établissement dans lequel est scolarisé son fils, le collège Simon-Wiesenthal à Saint-Vallier-de-Thiey (Alpes-Maritimes), n'a jamais fait aucun effort pour organiser en amont le voyage. "L'échange scolaire étant prévu depuis l'année dernière, nous avons rapidement souhaité prendre les devants. Mais lorsque nous avons tenté d'organiser des rendez-vous avec les professeurs ou le directeur, nous nous sommes heurtés à un mur. De même, quand nous avons alerté le rectorat, on nous a dit qu'il était trop tôt..."
Accompagnés par l'Association des jeunes diabétiques (AJD), les parents de Gabriel ont saisi, en janvier dernier, le Défenseur des Droits. Pour l'heure, la co-présidente de l'AJD, Carine Choleau, précise que l'étude du dossier prend du temps, mais qu'elle est en cours. Selon elle, il y a clairement un problème de communication. "A aucun moment, il n'y a eu une recherche de solution et une volonté de dialogue de la part de l'établissement."
"Aucune volonté de dialogue de la part de l'établissement."
Discrimination. Selon Carine Choleau, "ces cas ne sont pas rares, mais ne devraient pas arriver compte tenu du cadre réglementaire et de l'autonomie de l'enfant." En effet, les textes relevant du Code de l'Education sont clairs : un élève ne peut être écarté d'une sortie ou d'un voyage scolaire (ni même d'une activité sportive ou de la cantine) pour des raisons autres que pédagogiques. Le diabète n'empêche donc pas de voyager. Néanmoins, tout se passe d'autant mieux que les modalités du séjour auront été établies bien à l'avance. "La préparation du voyage doit impliquer les parents le plus tôt possible", stipule notamment une circulaire du Code de l'Education. Le Projet d'Accueil Individualisé (PAI) permet ainsi de préciser les conditions des voyages extra-scolaires, en permettant aux enseignants, éducateurs, etc. d'être mieux informés, d'organiser les soins et ainsi de pouvoir accueillir l'enfant dans les meilleures conditions. Mais dans le cas du voyage en Allemagne de Gabriel, aucun avenant au PAI n'a été proposé. D'ailleurs, toutes les propositions de la famille pour faire en sorte que le collégien puisse participer –en particulier que son père accompagne la classe- ont été refusées. "Je comprends que le diabète puisse inquiéter et qu'il existe un manque d'information sur le sujet, mais de mon côté j'étais justement prête et disponible pour répondre aux questions et pour proposer des solutions. Or, à aucun moment, ils nous ont demandé quoi que soit… Si on ne connaît pas les contraintes, on ne peut pas apporter de réponses, c'est du bon sens !"
En outre, ce voyage s'intègre dans un projet global de la classe. Les camarades de Gabriel ont ainsi reçu leurs correspondants fin mars pendant une semaine. Des sorties ont même été organisées au cours de ce séjour. "Si je n'avais pas envoyé un mail à ses professeurs, il en aurait été exclu. Habituellement, il participe à toutes les sorties scolaires…" Quant au voyage prévu en Bavière, Gabriel et ses parents le feront donc de leur côté, et par leurs propres moyens. "Nous avons prévu de loger chez l'habitant afin qu'il puisse parler allemand comme ses camarades et nous allons suivre le programme prévu par la classe, donc lui faire visiter les mêmes lieux touristiques, en prenant soin de ne pas nous y trouver au même moment afin de ne pas croiser ses copains. C'est compliqué, mais au moins au retour, il aura le même niveau que les enfants de sa classe."
Est-ce que cela touche son fils ? "Oui, évidemment... Heureusement, il a de bons camarades de classe et c'est un bon élève. Mais, depuis qu'il est petit, on bataille pour qu'il ne soit pas confronté à des discriminations. Quand il était à l'école, il ne réalisait pas et nous avons eu la chance de croiser des équipes enseignantes bienveillantes avec lesquelles cela c'est très bien passé. Aujourd'hui, il est conscient que la situation n'est pas normale. Il est équipé d'une pompe et gère son diabète seul, sans se plaindre, alors qu'il n'a pas l'insouciance d'un autre adolescent. Mais cela, certains adultes ne s'en rendent pas compte, c'est une double peine."
En France, près de 20 000 enfants sont diabétiques. La quasi-totalité d'entre eux (95 % à 98 %) sont diabétiques de type 1, c'est-à-dire qu'ils ne sécrètent pas d'insuline en raison de la destruction de leurs cellules du pancréas. Aussi, le traitement repose sur l'injection d'insuline quotidienne, aussi appelée insulinothérapie. Si les premiers temps sont difficiles et chamboulent le quotidien des familles, après une période d'adaptation et d'apprentissage, les enfants deviennent autonomes dans la gestion de leur pathologie. Ils sont capables de contrôler leur glycémie et de gérer les injections d'insuline. D'autant plus que les outils de prise en charge ont beaucoup évolué ces dernières années. Avec l'arrivée sur le marché des pompes à insuline dans les années 80, puis de dispositifs révolutionnaires d'auto-surveillance de la glycémie, tel que le Freestyle libre il est aujourd'hui possible de vivre avec un diabète tout en maintenant une vie scolaire et sociale normale.
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La campagne "Je fais un vœu : choisir le métier de mes rêves" a récemment dénoncé une législation totalement inadaptée et déconnectée des progrès thérapeutiques et des conditions actuelles de travail,