Médicaments en vente libre dangereux : "être prudent, mais ne pas s'affoler"
Selon 60 Millions de consommateurs, 28 médicaments délivrés sans ordonnance pour soigner rhumes et maux digestifs, seraient dangereux. La Présidente du Conseil de l’Ordre des Pharmaciens, Isabelle Adenot, estime qu'il n'y a pas lieu d'affoler tout le monde.
Peut-être avez-vous vu la Une du hors-série de 60 Millions de Consommateurs, "La liste des médicaments dangereux". Dans cette enquête sur l'automédication, l'association a passé au crible 61 médicaments courants en accès libre et indiqués contre le rhume, le mal de gorge ou encore les troubles intestinaux. Résultat : sur 61 médicaments très prescrits seuls 13 d'entre eux seraient efficaces et sans risque. Pour les autres, 20 ne seraient pas efficaces mais sans danger et 27, comme Actifed Rhume, Dolirhume ou encore les pastilles Drill, seraient carrément "à proscrire" en raison de risques. Eclairage par Isabelle Adenot, Présidente du Conseil de l'Ordre des pharmaciens.
L'enquête de 60 Millions de Consommateurs épingle 27 médicaments, couramment utilisés par les Français. Quelle est votre réaction ?
J'ai envie de dire que 100% des médicaments sont dangereux ! Les médicaments, même en libre accès, contiennent une substance active, qui une fois dans le corps peut être dangereuse. Aucun médicament n'a un risque zéro. Donc pour résumer, il ne faut évidemment pas banaliser ces médicaments, qui clairement peuvent potentiellement présenter des risques, mais de là à affoler tout le monde, il y a un grand pas !
J'incite vivement les utilisateurs de ces médicaments qui constateraient un effet indésirable à faire une déclaration de pharmacovigilance. Ces médicaments, je le rappelle, sont surveillés par l'Agence du médicament et leur balance bénéfice/risque est réévaluée chaque année. Donc, s'il s'avère que les risques sont supérieurs aux bénéfices, alors le médicament sera retiré du marché. Je m'étonne d'ailleurs de la position du Pr Giroux [l'un des experts, pharmacien, consulté par 60 Millions de consommateurs, ndlr], alors qu'il a fait partie de la Commission de mise sur le marché de ces mêmes médicaments…
Quelle est votre position sur l'automédication ?
Je le répète, il faut inciter les Français à être prudent. Moins on prend de médicaments, mieux on se porte ! Mais avoir un accès direct à ces médicaments est une bonne chose. Lorsque vous avez mal à la tête, vous n'allez pas prendre rendez-vous chez le médecin… J'ajoute que la France est largement à la traîne en matière d'automédication, comparativement à ses voisins puisqu'elle représente 15% du marché français en volume, contre 32 % pour la moyenne européenne. On constate d'ailleurs une baisse contenue de l'utilisation de ces médicaments. Culturellement, les Français demeurent très attachés à la consultation chez le médecin.
Mais le pharmacien n'a pas toujours le temps d'informer ses clients…
S'il n'informe pas toujours spontanément, il n'empêche que si vous lui demandez conseil, il prendra le temps de répondre. Par ailleurs, j'incite tout le monde à déclarer à la pharmacovigilance tout problème, mais aussi à mettre en place un dossier pharmaceutique afin de limiter les risques liés aux interactions médicamenteuses. Je rappelle aussi qu'il ne faut pas utiliser les médicaments de quelqu'un d'autre en automédication, ni acheter ses médicaments sur des sites internet non officiels. Il faut en outre, vérifier les dates de péremption et ne pas dépasser les doses préconisées dans la rubrique posologie de la notice. Dernier conseil, méfiez-vous des messages délivrés par les publicités et préférez ceux du pharmacien !