Affaire Gardasil : "la décision du Parquet semble contestable"
L'enquête sur le Gardasil a été classée sans suite par le Parquet de Paris. Celui-ci considère qu'il n'y a pas de lien direct entre le vaccin et les pathologies dénoncées par les patientes. Mais leurs avocats ne vont pas en rester là.
L'enquête sur le Gardasil a été classée sans suite par le parquet de Paris le 26 octobre. "Aucune pathologie n'a été reconnue comme étant en lien de causalité directe avec ce vaccin", a expliqué à l'AFP une source judiciaire. La décision du Parquet de Paris, qui avait confié les investigations aux gendarmes spécialisés dans les atteintes à l'environnement et à la santé publique (Oclaesp), fait suite à celle de l'Agence française du médicament (ANSM), qui avait assuré en septembre dernier que les vaccins contre les infections à papillomavirus n'entraînaient "pas d'augmentation du risque global de survenue de maladies auto-immunes".
"Notre combat n'est pas terminé", a réagi l'avocat de 34 plaignantes, Jean-Christophe Coubris, auprès de l'AFP. Il déposera une plainte avec constitution de partie civile pour obtenir l'ouverture d'une information judiciaire et la désignation de juges d'instruction. Un recours également envisagé par Me Camille Kouchner, avocate de 16 autres plaignantes, qui juge la décision de classement "extrêmement contestable".
Elle s’explique au JournaldesFemmes : "Je ne suis pas étonnée par cette décision. Mais à première vue, la décision du Parquet est extrêmement contestable, dans la mesure où toutes les personnes impliquées dans ce dossier n’ont pas été entendues." L’avocate précise en effet que si certaines de ses premières clientes ont été auditionnées dans les semaines qui ont suivi le dépôt de la plainte en décembre 2013, ce n’est pas le cas de celles qui ont progressivement porté plainte depuis.
Les pathologies des victimes n'ont pas toutes été étudiées. La décision du Parquet semble essentiellement reposer sur l'étude menée sur plus de 2 millions d’adolescentes par l’Agence du médicament (ANSM) avec l’Assurance maladie. Une étude "rassurante" selon l'ANSM, même si elle avait toutefois pu mettre en évidence"une association statistiquement significative entre l’exposition aux vaccins contre les infections à HPV et deux des pathologies étudiées, les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin et le syndrome de Guillain-Barré". En outre, comme le souligne Maître Kouchner, cette étude n’avait pas analysé les pathologies dont souffre la majorité de ses clientes. En particulier, la maladie de Verneuil, écartée de cette étude. "Le Parquet estime qu’il n’y a pas de lien entre le vaccin et les pathologies des victimes, mais comment peut-il arriver à cette conclusion qui concerne des maladies qui n’ont vraisemblablement pas été étudiées, sur des filles qui n’ont pas été entendues !", s’étonne encore l’avocate.
"Je regrette que le procureur n'ait pas jugé nécessaire d'ordonner des expertises sur chacune des plaignantes et ne se soit basé que sur des études publiées, notamment la dernière" de l'ANSM, a déclaré de son côté Maître Coubris.
Au terme d’une enquête préliminaire particulièrement longue, puisqu'elle aura duré presque deux ans, sans qu’aucun juge d’instruction ne soit nommé, les autres études scientifiques publiées et les rapports médicaux joints au dossier ont-ils été sérieusement étudiés par le Parquet ? Tous les experts ont-ils été entendus ? "J’attends d’avoir les éléments du dossier, poursuit Camille Kouchner. S’il s’avère que les pathologies de mes clientes n’ont pas été étudiées, que les scientifiques et médecins experts sur ce sujet n’ont pas été entendus, alors en concertation avec mes clientes, j’envisage de me constituer partie civile pour saisir directement le juge d’instruction."
Pour rappel, Me Camille Kouchner qui représente les patientes victimes d'effets secondaires suite à la vaccination contre le papillomavirus avec le vaccin Gardasil des laboratoires Sanofi Pasteur MSD, a déposé plainte contre X pour "blessures involontaires et publicité trompeuse". Les plaintes ne visent donc personne en particulier étant donné le nombre d’acteurs potentiellement impliqués –laboratoire, autorités sanitaires…- dans cette affaire. Aussi, on ne peut que s’interroger sur cette décision qui semble essentiellement s'appuyer sur une étude menée par l’Agence du médicament, dont le rôle est d'autoriser la mise sur le marché des vaccins, en fonction de l'évaluation de leur bénéfice et de leurs risques.