E-cigarette : le Royaume-Uni favorable, et la France ?
Un rapport de l’Académie Royale de Médecine conclut que la cigarette électronique est susceptible d'être bénéfique pour la santé publique. Et confirme qu’elle est bien moins nocive que le tabac.
Les e-cigarettes sont susceptibles d'être bénéfiques à la santé publique, les fumeurs doivent être encouragés à les utiliser et le grand public peut être tranquillisé sur le fait que la e-cigarette est bien moins dangereuse que le tabac... Telles sont les conclusions rassurantes du rapport "Nicotine without smoke : tobacco harm reduction", diffusé par l'Académie Royale de Médecine, le 28 avril 2016.
Dans le détail, les auteurs affirment que la cigarette électronique ne constitue pas une porte d'entrée vers le tabagisme pour les non-fumeurs. "Le fait de vapoter ne provoque aucun attrait significatif et ne pousse à une quelconque progression de la cigarette chez les jeunes". Au contraire, elle semble majoritairement utilisée par d'anciens fumeurs. Donc dans l'objectif d'arrêter de fumer. Mais surtout, les experts de l'Académie Royale de Médecine estiment que l'e-cigarette peut aider certains fumeurs en échec de sevrage. "Chez les fumeurs, le recours à la cigarette électronique est susceptible de mener à une tentative d'arrêt du tabac qui ne se serait pas autrement produite, et, chez certains d'entre eux, à un sevrage réussi". Ainsi, ils considèrent qu'elle peut être considérée comme une porte de sortie du tabagisme.
En revanche, les méfaits liés au vapotage sur le long terme, ne peuvent être exclus, du fait de l'inhalation de substances potentiellement nocives. Mais les experts les minimisent en raison de leurs faibles proportions. "Les données disponibles suggèrent qu'ils n'excèdent probablement pas 5 % de ceux associés à la consommation de produits tabagiques, et pourraient bien être substantiellement moindre que ceux estimés", précise le rapport, avant de rappeler qu'un fumeur sur deux mourra de son addiction.
Un pas en avant, un pas en arrière. La cigarette électronique, autorisée depuis 2007 au Royaume-Uni, est, comme en France, l'objet de polémiques. Ce rapport très favorable à la cigarette électronique pourrait donc faire évoluer la politique anti-tabac outre-Manche. En France, les autorités de santé restent méfiantes et indécises à son sujet. Dans un avis publié en février 2016, le Haut Conseil supérieur de la Santé Publique (HCSP) reconnait que la cigarette électronique est bien moins novice que le tabac. Néanmoins, à la question : la e-cigarette est-elle une nouvelle arme de sevrage ?, les experts français ne tranchent pas, pointant un manque de données scientifiques fiables sur son efficacité et sur les effets à long terme. Aussi, le HCSP recommande "d'informer, sans en faire publicité, les professionnels de santé et les fumeurs que la cigarette électronique est une aide à l'arrêt du tabac et un mode de réduction des risques du tabac en usage exclusif." Mais, dans le même temps, est favorable à son interdiction dans tous les lieux affectés à un usage collectif (cafés, restaurants, discothèques, etc.). Avec toujours cet argument que la cigarette électronique pourrait "constituer une porte d'entrée dans le tabagisme" et induire "un risque de renormalisation de la consommation de tabac".
Les vapoteurs, enfumés ? Huit associations, parmi lesquelles l'Aiduce, SOS Addictions ou encore la Fédération française d'addictologie, regrettent dans un communiqué de presse commun adressé le 2 mai, que les utilisateurs ne soient pas davantage écoutés, en tant qu'experts de cette nouvelle approche de réduction tabagique. "Ce sont eux qui en ont fait évoluer l'efficacité et la sécurité par une approche communautaire. Les forums puis les réseaux sociaux, sont devenus des lieux d'échange et de soutien, permettant aux fumeurs novices en la matière de s'informer et de progresser vers une réduction de consommation ou une abstinence complète du tabac, pointe l'association. Mais, malgré cela, les autorités de Santé Publique sont restées sourdes à cette expertise venue du terrain puis de la communauté scientifique." Les associations s'inquiètent aussi de l'application imminente d'une directive européenne en droit français. La cigarette électronique tombera alors sous le coup de la directive européenne des produits du tabac, son usage sera donc interdit dans tous les établissements publics et toute forme de publicité directe et indirecte sera interdite. De quoi "freiner l'innovation en favorisant les cigarettes électroniques commercialisées par l'industrie du tabac, qui seule aura les moyens financiers, comme l'industrie pharmaceutique, de supporter les contraintes administratives et financières imposées par cette Directive", avance encore l'association.
Le 9 mai 2016 se tiendra à Paris (Conservatoire des Arts et Métiers) le 1er Sommet de la vape (www.sommet-vape.fr) qui réunira les principaux acteurs de la vape et ceux de la lutte contre le tabac. Mais Marisol Touraine n'y assistera pas.