Fin de vie : que contient le produit létal ?
La loi est en passe d'évoluer en France mais une question cruciale reste en suspens : quelle est la composition du produit administré à la fin ? Est-il déjà connu ?

Deux options sont possibles mais "le produit n'est pas encore défini" nous répond d'emblée le Pr Gérard Audibert, anesthésiste-réanimateur au CHU de Nancy et président du Comité d'éthique de la SFAR (Société française d'anesthésie et de réanimation). "Et c'est bien normal, puisque la loi elle-même n'est pas finalisée." Après un premier vote à l'Assemblée nationale, le texte doit encore passer devant le Sénat, historiquement plus réservé. "Le Sénat risque de retoquer plusieurs articles. On se dirige vers une commission mixte paritaire." Selon lui, le texte définitif ne sera pas adopté avant le printemps 2026. Une fois la loi votée, ce sera à la Haute Autorité de Santé (HAS) de préciser les modalités. "Un groupe de travail pluriprofessionnel sera chargé d'élaborer un protocole médicamenteux. Il s'appuiera sur la littérature scientifique et les pratiques étrangères, notamment en Suisse ou dans l'Oregon."
La première option est celle d'une prise par voie orale. Le texte actuel privilégie cette possibilité où la personne concernée prend elle-même le traitement, sans intervention du soignant. "En Suisse, il s'agit d'un liquide. Aux États-Unis, dans l'Oregon, c'est un comprimé mais cette option n'est pas sans faille. Le liquide est très amer. Certains vomissent ou avalent de travers, même s'ils prennent d'abord un traitement anti-vomitif. L'absorption orale n'est jamais totalement fiable." Dans certains pays, cette étape est organisée par des structures non médicales. "En Suisse, ce sont des associations qui organisent la prise. Si le geste échoue, la situation peut devenir très compliquée."
Autre solution évoquée : l'administration par perfusion d'un anesthésique puissant, provoquant un coma puis l'arrêt de la respiration. "C'est une technique sûre : on sait exactement ce que le patient reçoit. Le patient s'endort sereinement mais sans réveil", précise le Pr Audibert mais "l'effet de la perfusion n'est pas instantané. Il y a un délai entre l'acte et le décès, ce qui laisse une forme de distance pour le soignant."
À terme, le protocole sera national et standardisé. "Il n'y aura pas plusieurs options. Un seul produit, une seule dose, une seule méthode d'administration." Ce document servira aussi de référence juridique en cas de contentieux. "En cas d'incident, c'est ce protocole qui fera foi devant les tribunaux." Même autorisée, cette aide reste un moment fort. "Ce n'est pas la mission première des soignants même si parfois c'est l'étape ultime de l'accompagnement" conclut le Pr Audibert. "Le protocole devra aussi respecter la conscience du soignant, pas seulement la volonté du patient."