Vers une vaccination du papillomavirus dès 9 ans
Le Haut Conseil de la santé publique estime que le vaccin contre les papillomavirus, responsables de la plupart des cancers du col de l'utérus, devrait être proposé à l'école, dès 9 ans. Explications.
Le retour d'un vaccin polémique. C'est à la demande de la Direction Générale de la Santé (DGS) que le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a publié des recommandations afin d'améliorer la couverture vaccinale contre le papillomavirus. En résumé, le HSCP penche pour la mise en place d'un dépistage organisé du cancer du col de l'utérus sur l'ensemble du territoire ET la mise en place d'une stratégie vaccinale à grande échelle, avec éventuellement une vaccination proposée à l'école, dès 9 ans.
Trop de femmes échappent au dépistage par frottis. Actuellement la prévention des cancers du col de l'utérus repose sur deux stratégies. La première, c'est le frottis, qui permet de dépister les lésions précancéreuses et cancéreuses du col utérin. Il est proposé aux femmes de 25 à 65 ans, tous les 3 ans. La seconde, c'est la vaccination des jeunes filles de 11 à 14 ans contre les infections à HPV 16 et 18, virus à l'origine de 70 % des cancers du col de l'utérus. Aussi les vaccins Cervarix et Gardasil sont inscrits dans le Calendrier vaccinal depuis 2007 et 2011. Bien que le dépistage par frottis ait fait la preuve de son efficacité, l'Institut national du cancer (Inca) estime que 60 % seulement des femmes se font dépister. Une situation d'autant plus dommageable que 90 % des cancers du col de l'utérus pourraient être évités par un dépistage tous les trois ans, rappelle l'Inca. D'après le Baromètre cancer 2010, les femmes qui disposent de faibles revenus ou peu diplômées ont moins souvent recours au dépistage. Par ailleurs, les fortes disparités territoriales expliquent que certaines femmes soient tenues à l'écart de ce dépistage. Pour assurer une meilleure couverture de la population dépistée par frottis cervico-utérin, réduire les inégalités d'accès au dépistage et améliorer la qualité du dispositif, le déploiement d'un programme national de dépistage est prévu dans le cadre du plan cancer 2014-2019. Dans les pays où ces programmes existent, parfois depuis plus de 20 ans, les taux de couverture grimpent à 70 % (Royaume-Uni, Finlande, Pays-Bas, Norvège,...). En France, le programme de dépistage expérimental mis en oeuvre depuis 1994 en Alsace par l'association EVE (Association pour la prévention du cancer du col de l'utérus) a permis d'atteindre 72 %.
Et une couverture vaccinale très insuffisante en France. Côté vaccination contre le papillomavirus, elle est en baisse depuis 2010, et même inférieure à 25 % à 16 ans (données 2013). La méfiance des Français envers ce vaccin et les différentes plaintes à l'encontre du Gardasil ont sans doute participé à détériorer son image. Pourtant, le HSCP rappelle que dès leur mise sur le marché, Gardasil et Cervarix ont été placés sous sourveillance renforcée, notamment par le biais d'un plan de gestion des risques et de l'analyse des notifications spontanées d'effets indésirables. Les croyances entretenues par certains médecins et fortement relayées par les médias ont suscité une "défiance hautement injustifiée " vis-à-vis de la vaccination, écrit le HSCP, qui rappelle que "les données de pharmacovigilance disponibles, avec un recul de plus de sept ans, tant au plan national qu'international, ne permettent pas de retenir l'existence d'un lien de causalité entre cette vaccination et les événements indésirables graves qui lui ont été attribués en France, notamment la sclérose en plaque et d'autres maladies auto-immunes."
Qui sont les femmes qui ne se font pas vacciner ? Les mêmes que celles qui ne font pas de frottis. Selon plusieurs études, dont une enquête de l'Irdes (Institut de recherche et documentation en économie de la santé), menée en collaboration avec l'InVS, les indicateurs d'inégalité sociale influencent à la fois le recours au dépistage par frottis du col des femmes et la vaccination anti HPV des jeunes filles. On observe en effet que l'adhésion de la mère au programme de dépistage des cancers du col utérin favorise la vaccination de la fille contre les HPV. Et vice versa. Le HSCP arrive donc à la conclusion que la vaccination ne sera efficace que si elle "arrive à atteindre un pourcentage élevé de jeunes filles et qu'elle ne délaisse pas celles qui seront les moins enclines à adhérer au dépistage dans leur vie de femme." Autrement dit, la vaccination permettrait de cibler les jeunes filles qui auraient de toute façon échappé au dépistage par frottis, une fois à l'âge adulte.
Pourquoi ne pas s'en tenir à un dépistage organisé du cancer de l'utérus ? Selon le HSCP, la couverture du dépistage par frottis dépassera difficilement les 70 %. La vaccination contre les HPV pourrait donc "apporter une protection supplémentaire vis-à-vis de la mortalité par cancer du col de l'utérus".