Certaines personnes détestent le silence : la raison psychologique révélée
Apaisant pour certains, le silence peut se révéler terriblement angoissant pour d'autres. Une psychologue nous explique pourquoi.
"L'esprit comme la nature a horreur du vide", écrivait Victor Hugo. À tel point que certains redoutent le silence comme une menace. Le brouhaha de l'open space, l'agitation de la ville avec ses klaxons, ses musiciens, ses altercations entre les passants… Le bruit les rassure. En rentrant chez eux, ils s'empressent d'allumer la télévision ou la radio pour fuir le silence. Et eux-mêmes ?
Le silence est révélateur de notre état émotionnel. Il permet de se retrouver face à soi-même et à son intériorité. "Voilà pourquoi il effraie les personnes qui sont agitées à l'intérieur, qui sont angoissées et qui se sentent seules car le silence vient mettre en lumière toute cette agitation intérieure", explique Sophie Lavault, psychologue clinicienne et docteure en neurosciences. Et pour cause, quand on est dans le bruit, notre cerveau est en train de traiter les signaux extérieurs, il est moins occupé à traiter les signaux de l'environnement intérieur. Notre experte aime percevoir l'attention comme un projecteur attentionnel que l'on dirige d'un endroit à l'autre : vers l'extérieur lorsqu'il y a des stimuli autour de nous, et vers l'intérieur quand il y a un silence.
Le silence qui survient dans une conversation peut mettre mal à l'aise parce qu'il renvoie à l'incertitude. "Il manque à notre cerveau les clés pour connaître les intentions de l'autre, ce qui peut amener à se poser plein de questions sur ce que la personne est en train de penser", informe Sophie Lavault. Comme le cerveau déteste l'incertitude, il va effectuer des interprétations. On va interpréter le silence différemment selon que l'on est anxieux, jaloux, ou si l'on se sent en paix. De fait, le silence est dérangeant pour les personnes qui ont des émotions dérangeantes. "Quand l'autre est en train de me parler, je sais ce qu'il pense, alors que dans le silence, il pense peut-être du mal de moi. Par exemple, si j'ai peur de ne pas être aimée, je vais interpréter le silence de l'autre comme un potentiel rejet", illustre la psychologue clinicienne.
Pourtant, le silence a aussi de nombreux bienfaits sur notre santé mentale. En nous offrant un espace de répit et de récupération, le silence apaise notre système nerveux. Car quand on se trouve dans le brouhaha en permanence, notre cerveau est tout le temps en train de traiter de l'information. Résultat, on s'épuise. "Le silence invite à se reconnecter à soi, à mieux se concentrer, loin des distracteurs", argue la spécialiste. "On peut alors se reconnecter au réseau du vagabondage mental qui correspond au mode d'activation privilégié du cerveau quand on ne fait rien. C'est un état dans lequel on va brasser tout un tas d'informations du passé et du futur, et qui nous permet de laisser les pensées émerger pour pouvoir créer."