C'est quoi ce vaccin contre l'asthme allergique ?

Des chercheurs français démontrent l'efficacité d'un vaccin contre l'asthme allergique chez des souris "humanisées". Ces résultats sont en faveur de la prochaine étape : des essais cliniques chez l'humain et peut-être ensuite une arrivée en France.

C'est quoi ce vaccin contre l'asthme allergique ?
© Aliaksandr Marko - stock.adobe.c

L'asthme allergique (provoquée par des allergènes que l'on respire) est une maladie inflammatoire des voies aériennes qui touche 4 millions de Français. Des scientifiques français de l'Inserm, du CNRS, de l'Université Toulouse III-Paul Sabatier, de l'Institut Pasteur et de Neovacs travaillent sur un vaccin contre l'asthme allergique, le Kinoïde®. Leur dernière étude publiée le 17 février 2023 dans la revue Allergy démontre que ce vaccin est capable de produire des anticorps neutralisant les protéines impliquées dans l'asthme allergique chez des souris "humanisées". "Nous ouvrons ainsi un peu plus la voie à l'organisation d'essais cliniques. Nous sommes actuellement en train de discuter avec tous les partenaires du projet pour mettre en place ces études chez l'humain" conclut Laurent Reber, Directeur de Recherche Scientifique à l'Inserm.

Chez les asthmatiques allergiques, l'exposition aux allergènes (acariens, pollens etc) provoque une surproduction d'anticorps appelés immunoglobulines E (IgE) et de protéines appelées "cytokines de type 2" dans les voies aériennes (bouche, nez, gorge, larynx, trachée et poumons). Les chercheurs dont  Laurent Reber avaient déjà montré dans une étude publiée en mai 2021 dans la revue Nature Communications que ce vaccin conjugué (vaccin contenant un antigène associé à une protéine pour augmenter son efficacité) était efficace pour réduire les symptômes de l'asthme allergique en produisant des anticorps dirigés contre les "cytokines de type 2" de la souris. "Six semaines après la première injection du vaccin conjugué, 90% des souris présentaient des fort taux d'anticorps. Plus d'un an après la primo-immunisation, 60% d'entre elles avaient encore des anticorps capables de neutraliser l'activité des cytokines" indiquaient les scientifiques. Dans l'optique de mettre en place des essais cliniques chez l'humain, leur étude 2023 s'est penchée sur l'efficacité de ce vaccin chez l'humain. Ils ont ainsi remplacé les gènes des cytokines chez les souris par les gènes humains de ces mêmes protéines et ont sensibilisé les souris "humanisées" à un extrait d'acariens de poussière domestique. Résultats : le vaccin a produit des anticorps capables de neutraliser les "cytokines de type 2" humaines jusqu'à plus de 3 mois après l'injection. Par ailleurs, l'administration du vaccin a également réduit les symptômes de l'asthme chez les souris "humanisées".

Ce vaccin pourrait également cibler les allergies alimentaires

"Une vaccination contre l'asthme allergique représente un espoir de traitement à long terme de cette maladie chronique, et au-delà, une perspective de réduction des symptômes d'allergie liés à d'autres facteurs, puisque ce vaccin cible des molécules [protéines] impliquées dans différentes allergies", souligne Pierre Bruhns, responsable de l'unité Anticorps en thérapie et pathologie à l'Institut Pasteur dans un communiqué. En effet, les protéines en question sont également impliquées dans certaines maladies comme la dermatite atopique et l'allergie alimentaire. A date, les inhalateurs à base de corticoïdes constituent le traitement de première intention pour l'asthme "classique". Pour les cas les plus sévères, des traitements à base d'anticorps monoclonaux thérapeutiques ciblant les protéines impliquées dans la pathologie existent mais leur coût est élevé et le mode d'administration oblige les patients à recevoir des injections souvent à vie.

Sources :

- Nouvelle étape franchie dans le développement d'un vaccin efficace contre l'asthme allergique, Institut Pasteur, 7 mars 2023

- Un vaccin ciblant l'IL-4 et l'IL-13 humaines protège contre l'asthme chez les souris humanisées, Allergy, 17 février 2023

- La double vaccination contre l'IL-4 et l'IL-13 protège contre l'asthme allergique chronique chez la souris, Nature Communications, 11 mai 2021