Audrey, paralysée dans son sommeil : "Je vois des choses mais je ne peux ni parler, ni crier"
TÉMOIGNAGE. A 27 ans, Audrey souffre de paralysie du sommeil. Elle nous a raconté les expériences cauchemardesques et hallucinatoires qu'elle subit, paralysée dans son lit, depuis plus de 10 ans.
Le Journal des Femmes : Quand ont commencé vos épisodes de paralysie du sommeil ?
Audrey : Je m'en suis rendue compte il y a plusieurs années. J'étais au début des années de lycée, je devais avoir 15 ans. Cela arrivait dans certaines positions notamment quand je dormais sur le dos et quand j'étais très fatiguée.
Comment se manifestent ces épisodes et que ressentez-vous ?
Audrey : J'ai l'impression d'être réveillée, d'avoir les yeux ouverts, je vois l'environnement qu'il y a autour de moi, la chambre dans laquelle je dors. Je sens les choses mais je ne peux pas bouger, je suis comme "plaquée". C'est comme si je me réveillais et que j'étais paralysée, je ne peux ni parler, ni crier. Parfois j'essaie de crier mais aucun son ne sort. Des personnes qui ont dormi avec moi m'ont dit qu'elles entendaient un peu des "mmmm" à l'intérieur de moi. Au début, quand j'étais plus jeune, ça me faisait un peu paniquer car je pensais que c'était un peu paranomal mais en recherchant sur Internet j'ai vu que c'était quelque chose qui existait.
"Je vois des personnes qui s'introduisent dans ma chambre ou ma lumière qui s'allume et s'éteint."
Que voyez-vous dans ces moments là ?
Audrey : Je vois des choses pas réelles, souvent angoissantes, de l'ordre des cauchemars. C'est vraiment désagréable. Par exemple des personnes qui s'introduisent dans ma chambre ou ma lumière qui s'allume et qui s'éteint ou ma porte qui s'ouvre et qui se ferme. Quand je dormais avec mon ex, je le voyais faire le tour mon lit comme s'il était somnambule, je voulais lui parler mais je n'y arrivais pas, je n'arrivais pas à bouger puis je me réveillais et je lui demandais : "Qu'est-ce qui t'a pris de faire ça ?" mais en fait il n'avait rien fait du tout pourtant ça semblait tellement réel.
Faites-vous du somnambulisme ?
Audrey : Non. En revanche quand j'étais plus jeune, je parlais beaucoup la nuit et apparemment je dormais les yeux ouverts.
Avez-vous des "trucs" pour sortir d'un épisode de paralysie ?
Audrey : J'ai lu des conseils pour essayer de sortir de ça, de bouger les pieds notamment mais je n'y arrive pas. J'ai l'impression de ne pas contrôler et de ne pas réussir à rationaliser. J'essaie parfois de me dire que ce n'est qu'un rêve mais je n'arrive pas vraiment à savoir si ça fonctionne ou si c'est le fait que j'attende que ça passe qui fait que je me réveille.
"J'ai l'impression de ne pas contrôler, de ne pas réussir à rationaliser."
Quand surviennent ces épisodes ?
Audrey : J'ai plutôt l'impression que ça arrive à la fin de la nuit parce qu'après je me réveille et il fait jour. Mais ça me le fait de moins en moins, une fois tous les deux mois. Il y a quelques années, c'était beaucoup plus fréquent, plutôt une fois par semaine.
Comment expliquez-vous que vous en faites moins aujourd'hui ?
Audrey : Je ne sais pas trop. J'avais remarqué que ça me le faisait quand j'étais couchée sur le dos. Donc j'essaie de ne pas m'endormir sur le dos, c'est peut-être ça.
Etes-vous capable de savoir si ça va se produire, avant de vous endormir ? Par exemple si vous avez eu une journée stressante ?
Audrey : Non pas du tout. Je n'ai pas l'impression que ça me le fasse quand je suis stressée, d'ailleurs ça me l'a déjà fait quand j'étais en vacances. J'ai plus l'impression que ce soit lié au fait que je dorme sur le dos. Après, on m'a aussi dit que ça pouvait être lié à des traumatismes.
"J'ai subi des agressions sexuelles à 15 ans, c'est peut-être lié."
Vous souvenez-vous d'un événement marquant lié à votre paralysie du sommeil ?
Audrey : Quand j'avais 15-16 ans, j'ai subi des agressions sexuelles par mon ex. En y réfléchissant je me dis que peut-être c'est lié.
Avez-vous des personnes dans votre famille qui font aussi de la paralysie du sommeil ?
Audrey : Ma mère me disait qu'elle en faisait quand elle était plus jeune mais qu'elle ne savait pas ce que c'était. En lui parlant de moi, de ce que je ressentais, elle m'a dit que c'était comme elle.
Appréhendez-vous de vous endormir le soir ?
Audrey : Plus maintenant mais quand c'était plus souvent, j'y pensais et je me disais : "J'espère que ça ne va pas me le faire cette nuit." Aujourd'hui ça m'angoisse un peu moins.
Et le matin, comment vous sentez-vous au réveil après une telle expérience ?
Audrey : Quand je me réveille d'un épisode de paralysie du sommeil, je suis assez dans les nuages comme quand on se réveille d'une nuit très longue et qu'on est un peu dans le brouillard, ça me fait ça pendant quelques heures.
Avez-vous mis en place des solutions pour ne plus faire de paralysie du sommeil ?
Audrey : Je suis une thérapie, j'en ai parlé, ça m'a aidé mais sans vraiment faire un travail sur ça. J'ai l'impression que pas mal de gens font de la paralysie du sommeil sans le savoir et ne vont pas forcément en parler alors que c'est quelque chose qui peut potentiellement s'arranger.