Des repères pour mieux identifier la dépression légère ou sévère
La Haute autorité de santé publie des recommandations pour mieux dépister la dépression. Mais aussi pour mieux la prendre en charge, en particulier en limitant le recours aux antidépresseurs.
Dans sa vie, une personne sur cinq connaîtra un épisode dépressif et près d'un Français sur 10 aurait connu un épisode dépressif au cours des douze derniers mois. Pourtant, de nombreux cas de dépression ne sont ni repérés ni traités, "augmentant le risque de suicides et entraînant une dégradation de la vie sociale et personnelle", déplore la Haute autorité de santé (HAS). A l'inverse, certaines déprimes passagères ou certains troubles psychiques graves sont parfois pris pour des dépressions et traités de façon inadéquate. Et, même lorsque la dépression est correctement diagnostiquée, sa prise en charge est incomplète car elle repose trop souvent sur les antidépresseurs, prescrits généralement sans suivi ni psychothérapie. En somme, l'usage des antidépresseurs est insatisfaisant : trop souvent prescrits pour des dépressions légères, pas assez dans des dépressions sévères, ou délivrés sans psychothérapie ni suivi. C'est dans ce contexte, que la HAS publie des recommandations pour aider les médecins généralistes à mieux comprendre cette pathologie et ainsi proposer une prise en charge plus adaptée à chacun. Les généralistes, de par leur place centrale dans la chaîne de soins, sont en contact régulier avec les patients. Ils sont ainsi les mieux placés pour détecter des changements d'attitudes, prémices d'une dépression. En outre, il est aussi parfois le seul recours dans certains territoires où les médecins spécialistes sont rares.
Identifier une dépression
Non, la dépression ne se manifeste pas que par de la tristesse ou un sentiment de "déprime". En fait, c'est un ensemble de symptômes sur une période longue qui signent la dépression. Ces symptômes sont les suivants : humeur dépressive, perte d'intérêt ou d'énergie, mais aussi concentration réduite, diminution de l'estime de soi, sentiment de culpabilité, idées et comportement suicidaires ou encore troubles du sommeil ou de l'appétit. Des symptômes qui retentissent sur la vie professionnelle, sociale ou familiale, et qui génère une véritable détresse.
"Le médecin devra éliminer d'autres hypothèses pour lesquelles les symptômes sont communs : troubles anxieux, troubles psychiques, maladies physiques (hypothyroïdie, maladies neuro-dégénératives…), abus de substances psychoactives ou de médicaments", recommande la HAS. "Il devra aussi systématiquement envisager la possibilité d'un trouble bipolaire, qui associe des épisodes dépressifs à des épisodes maniaques pouvant passer inaperçus. En cas de doute, pour confirmer son diagnostic, le médecin généraliste pourra demander l'aide d'un spécialiste."
3 niveaux d'intensité distincts
La dépression peut être légère, modérée ou sévère. Dans une dépression légère, la personne rencontre des difficultés à mener ses activités du quotidien (travail, vie familiale et sociale) mais y parvient avec un effort supplémentaire. Dans le cas d'une dépression modérée, ces activités du quotidien sont très difficilement réalisables et au niveau sévère, quasi-impossibles ou impossibles.
Antidépresseurs : pour qui ?
Que la dépression soit légère ou sévère, sa prise en charge repose en premier lieu sur le soutien psychologique (psychothérapie). Les antidépresseurs doivent être associés au cas par cas, rappelle la HAS : "ils ne sont pas indiqués en cas de dépression légère, peuvent être envisagés pour les dépressions modérées et doivent en revanche être proposés d'emblée pour les dépressions sévères. En cas de prescription, un suivi régulier demeure indispensable (toutes les 4 à 8 semaines) pour évaluer la tolérance et l'efficacité du traitement. Une fois les symptômes disparus, le traitement médicamenteux devra être poursuivi entre 6 et 12 mois pour prévenir le risque de rechute. L'arrêt doit être progressif et accompagné par le médecin.
Trois populations doivent faire l'objet d'une vigilance particulière.
D'abord, les personnes âgées, chez qui toute dépression, même d'intensité légère, comporte un risque suicidaire élevé. Mais aussi les personnes en deuil, qui peuvent être sujettes au risque suicidaire. Chez la femme qui vient d'accoucher, il faut différencier le "baby blues", contrecoup émotionnel et physique de l'accouchement qui ne dure pas, de la dépression du "post-partum". Enfin, la dépression passe souvent inaperçue chez l'adolescent qui peine à montrer ses sentiments, et est parfois mal compris par son entourage qui associe ses changements d'humeur à un crise d'adolescence.