"Atteinte d'alopécie, j'ai fait un choix radical"

Après 15 ans de lutte, Victoria a cédé.

"Atteinte d'alopécie, j'ai fait un choix radical"
© Victoria / Journal des Femmes

Le combat aurait pu être gagné, les traitements qu'a suivi la jeune femme depuis ses 17 ans fonctionnent parfois, non sans risque pour certains : "Pendant dix ans, j'ai pris de l'Androcur©, un médicament controversé puisqu'il m'a valu en 2019 un courrier du Ministère de la Santé me recommandant de faire une IRM cérébrale. Je m'y suis rendue la boule au ventre." Le médicament, un oestroprogestatif, est entré dans le viseur des autorités car facteur de multiplication par sept du risque de méningiome, une tumeur cérébrale non cancéreuse mais potentiellement handicapante. Si sa visée première est le cancer de la prostate, il a été couramment prescrit pour tempérer l'excès de testostérone à des patients qui souffraient d'acné, de chute de cheveux, ou encore aux personnes transgenres. Il continue de l'être, mais après information préalable des patients : "J'ai préféré ne pas continuer en connaissant le risque, d'autant que l'excès de testostérone était chez moi minime, pas suffisant pour expliquer ma chute de cheveux", explique Victoria, qui a continué sa pilule riche en œstrogènes mais plus adaptée.

"Je ne perdais pas mes cheveux sur une zone spécifique, mais un peu partout au fil du temps"

L'hormone mâle est la principale raison de la calvitie masculine, mais l'alopécie féminine est moins typique : "Je ne perdais pas mes cheveux sur une zone spécifique, mais un peu partout au fil du temps." Pourquoi les follicules pileux meurent-ils ? C'est souvent un mystère à laquelle la médecine ne peut pas (encore) tout : "Je me frottais aussi le cuir chevelu avec une lotion, le Minoxidil©, sachant que la friction d'une façon générale irrigue, donc maintiendrait plus longtemps les follicules en vie. Je ne saurai jamais si ces traitements ont retardé les dégâts, mais de toute façon, je ne pouvais pas m'en satisfaire."

Victoria a toujours tenu à camoufler sa chute de cheveux : "Me coiffer le matin n'avait qu'un objectif, masquer les zones clairsemées. J'ai tenté les rajouts, essuyant des remarques comme "pourquoi tu te mets des rajouts ?" Je n'osais pas en parler, j'enviais les filles qui disaient en arrivant au lycée, puis à l'agence de communication où je travaille : "J'ai les cheveux dans tous les sens, ce matin !" Une chevelure indomptable, c'était mon rêve, l'élément-clé de la panoplie féminine dans le stéréotype de genre." La jeune femme a rusé avec les poudres densifiantes, qui dissimulent le cuir chevelu apparent, mais elles ont surtout l'art d'épaissir un cheveu existant. Quand elle a rencontré son petit ami, il y a un an, le ton léger de sa confidence sur son complexe ne l'a pas leurré : "Il a tout de suite compris que derrière, il y avait de la souffrance et de la lassitude." Tout de suite, il lui a suggéré les perruques : "Mais je ne suis pas sûre que le port en soit très confortable, et une belle perruque est hors de prix. Un jour peut-être, mais je penchais pour le rasage, mûrissant l'idée depuis un moment." Quand Victoria exprime son intention, il est tout de suite partant : "La beauté d'une femme n'est pas dans ses cheveux." Une phrase rare pour un homme. A quelques jours de fêter les 32 ans de Victoria, c'est ensemble qu'ils ont procédé à l'opération, avec une tondeuse à la maison : "Je voulais m'emparer de mon destin capillaire ! J'ai ainsi fait choix radical du rasage à la lutte inutile."

Victoria suit toujours un traitement, initialement destiné aux problèmes rénaux, le Spironolactane©, dont l'effet sur l'alopécie féminine a été constaté. Elle continue aussi ses frictions quotidiennes du cuir chevelu, la pression en moins : "C'est peut-être mieux que rien, mais mon vrai soulagement est venu de la grande décision d'en finir avec mes cheveux. J'ai dépensé des fortunes en cures et injections diverses, y compris fabriquées à partir de mon propre plasma, une technique qui fonctionne chez certains, pas chez moi.' La nouvelle coupe de Victoria a été saluée par son entourage, passant pour une audace féminine auprès de ceux qui ne partageaient pas son secret : "On me dit que c'est sexy, tant mieux. Moi, ce qui m'amuse, c'est les regards dans la rue alors que mon copain a les cheveux aux épaules !" Où comment transformer une charge mentale en signal iconique.