Souffrance des étudiants : que prévoit le gouvernement ?

15 mesures ont été présentées par le gouvernement pour lutter contre la souffrance des étudiants dans le médical. Mieux encadrer les stages, faire de la prévention, créer un centre national d'appui… Quels sont les engagements annoncés ?

Souffrance des étudiants : que prévoit le gouvernement ?
© Wavebreak Media Ltd - 123RF

En juin 2017, une enquête menée par l'InterSyndicale Nationale des internes (ISNi) a montré que deux tiers des étudiants, internes ou jeunes médecins souffraient d'anxiété, un tiers de troubles dépressifs et un quart d'entre eux avaient même déjà eu des idées suicidaires. Par ailleurs, plus de 6 % d'entre eux avouent consommer des antidépresseurs et 20 % sont sous anxiolytiques. Alors, être en souffrance permanente est-il compatible avec le fait de soigner les patients avec calme et bienveillance ? La réponse est "non" pour la psychiatre Donata Marra qui a remis, le mardi 3 avril 2018 au gouvernement, son rapport sur la "Qualité de vie des étudiants en santé", un travail qui lui avait été commandé en juillet 2017 par le gouvernement suite à la publication des résultats de l'enquête de l'ISNi. Résultats.

Y a-t-il un mal-être dans le monde hospitalo-universitaire ? "Oui", pose d'emblée la psychiatre, avant d'évoquer les raisons de cette souffrance : une absence de soutien des supérieurs hiérarchiques, des ressources matérielles insuffisantes, une insuffisance d'encadrement, des stages émotionnellement difficiles, une grande fatigue ou encore des violences psychologiques sont autant de facteurs liés à la survenue d'une anxiété, voire d'une dépression. Et rien de nouveau ! Déjà, en mai 2017, la Haute Autorité de Santé avait indiqué que "les professionnels de santé en activité ou en formation étaient plus exposés au risque d'épuisement professionnel, étant donné la pénibilité de leur travail, que ce soit pour des causes intrinsèques liées à la nature même de l'activité médicale (confrontation avec la souffrance et la mort, prises en charge impliquant l'entrée dans l'intimité des patients…) ou encore la charge et l'organisation du travail".

Faciliter la prévention, repenser les études de médecine et mieux encadrer les stages. L'objectif du rapport de Donata Marra est "de proposer un plan d'interventions à la mesure des enjeux [qui] doivent être coordonnées, associant des interventions individuelles, de groupes et de prévention". Présenté par la ministre de la Santé Agnès Buzyn et la ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal, ce rapport définit quinze mesures qui ont pour but d'améliorer le bien-être des 350 000 futurs soignants en France. Quelles sont les principaux engagements ?

Soutenir, prévenir et intervenir :

  • Créer dans toutes les universités et les facultés une structure d'accompagnement (en garantissant la confidentialité de ces visites), ouverte à tous les étudiants, particulièrement aux victimes de violence : cette structure permettra un meilleur "dépistage des signes de souffrance mentale" et "l'obtention d'un avis psychiatrique" ;
  • Évaluer systématiquement les lieux de stage et déclencher une procédure de réexamen en cas d'évaluation insatisfaisante ;
  • Améliorer les conditions de travail en stage en respectant le "repos de sécurité" de l'étudiant, en limitant son temps de travail hebdomadaire à 48 heures et en améliorant ses conditions d'accueil et d'hébergement lors d'un stage en milieu rural.

Repenser les études de santé :

  • Rendre l'étudiant acteur de son orientation en créant un module d'information sur les formations en santé accessible sur Parcoursup à la rentrée 2018 ;
  • Repenser les cursus pour les axer sur les compétences à acquérir et surtout, sortir d'une logique de compétition ;

Mesurer, repérer et partager les bonnes pratiques :

  • Créer un centre national d'appui doté de moyens spécifiques et réunissant des enseignants de toutes les formations en santé : ce centre permettra d'identifier les différents facteurs de risques psycho-sociaux propres aux étudiants et proposera un site d'informations et de formations ;
  • Réaliser un clip (en lien avec Santé publique France et les associations étudiantes) pour "aider les étudiants à détecter la souffrance chez leurs collègues et les accompagner vers des ressources" appropriées.

Qu'en pensent les associations étudiantes ? Bien qu'elle salue les différentes mesures et l'engagement du gouvernement, l'Association Nationale des Étudiants en Médecine de France (ANEMF) regrette toutefois que la question du statut des enseignants en médecine et surtout celui de l'étudiant hospitalier, "actuellement précaire et dévalorisé" n'aie pas été traitée. "C'est un statut dont la dévalorisation explique un manque de reconnaissance chez les étudiants en médecine, ne pouvant être dissocié de leur mal-être global", précise l'ANEMF.