Le dépistage précoce par prise de sang testé pour le cancer du poumon
Le CHU de Nice annonce qu’il lance une étude visant à valider un test de dépistage précoce du cancer du poumon. Objectif : détecter la maladie avant même qu’elle ne soit visible par imagerie.
Et si demain, on pouvait dépister le cancer du poumon par une simple prise de sang ? C’est le projet un peu fou, mais réaliste, que mènent des chercheurs niçois depuis plusieurs années. Il y a tout juste un an, en novembre 2014, les médias relataient ainsi la découverte d’un test très prometteur capable de détecter un cancer du poumon plusieurs années avant qu’il ne se déclare. Dans une population à haut risque de cancer du poumon (fumeurs souffrant de bronchopathie chronique obstructive), l’équipe niçoise, dirigée par Paul Hofman, avait pu montrer qu’on pouvait mettre en évidence la présence de cellules tumorales circulantes plus d’un an avant que le cancer du poumon soit diagnostiqué par scanner. Une petite révolution donc, quand on sait que le cancer du poumon est un cancer de mauvais pronostic en raison d’un dépistage souvent trop tardif, à un stade avancé, où les patients ne sont généralement plus opérables.
Une étude prometteuse (finalement) financée. Cette première mondiale avait suscité énormément d’enthousiasme et d’attente. Elle faisait toutefois état de résultats préliminaires, obtenus dans un seul centre, et devait donc être validée à grande échelle. Dans un premier temps, le Pr Hofman avait rencontré des difficultés pour obtenir un financement lui permettant d’étendre son étude à un plus grand nombre de patients et à d'autres centres de recherche français. "Nous avons réuni suffisamment d'argent pour décider de commencer ce projet de validation sans attendre, dans un contexte très concurrentiel et parce que nous avons un test extrêmement prometteur", a indiqué lundi à l’AFP le professeur Paul Hofman. L’étude, financée par les collectivités locales, la Ligue contre le cancer, la Fondation de France et des donateurs privés, vise à recruter d’ici un an une cohorte de 600 personnes. Baptisée "Air", l'étude débutera dans les Alpes Maritimes fin 2015. Elle fera de plus appel à des volontaires via un site internet, permettant d'entrer en contact avec un réseau de 14 autres CHU en France associés à l'étude début 2016.
Filtrer les cellules pour les isoler. Si les premiers résultats menés au CHU de Nice avaient été positifs, c'est en partie grâce à la précision du test utilisé pour isoler les cellules tumorales circulantes (les CTC) parmi les milliards de cellules sanguines, avant même que le cancer ne soit visible par imagerie. Parmi toutes les méthodes disponibles, le chercheur avait choisi le test Iset (développé par la société Rarecells Diagnostics), basé sur une analyse morphologique des cellules. "Sur le principe, il fonctionne comme un filtre qui laisse passer les cellules sanguines mais qui retient à la surface les cellules cancéreuses, qui sont beaucoup plus volumineuses et moins déformables. Ensuite, il suffit de les colorer pour les visualiser, avait alors expliqué au JournaldesFemmes Paul Hofman. Avec ce test, l’équipe de scientifiques avait mené une étude sur 168 patients à risque. Chez 5 d'entre eux, le test Iset avait été positif : des cellules tumorales circulantes avaient été isolées. Ce qui pouvait laisser prédire que ces patients risquaient de développer un cancer du poumon. Ces mêmes patients avait alors bénéficié d'une surveillance radiologique une fois par an, qui avait effectivement montré l’apparition de nodules cancéreux (stade avant l’apparition d’une tumeur) entre 1 et 4 ans plus tard. Dépistés précocement, ces 5 patients avaient été opérés et avaient tous guéri.
Appel aux volontaires. Les volontaires qui souhaitent participer à l'étude "Air" doivent avoir plus de 55 ans, être fumeur ou ancien fumeur et atteint d’une broncho pneumopathie chronique obstructive (BPCO). Comme dans la première étude menée par Paul Hofman, cette nouvelle étude les soumettra chaque année (et pendant 3 ans) à un simple test sanguin couplé à un scanner thoracique. Les résultats définitifs seront publiés en 2019 pour une mise à disposition du test, le cas échant, quelques années plus tard.
Le cancer du poumon est en France la 1ère cause de mortalité par cancer chez l’homme (21 326 morts en 2012) devant le cancer colorectal (9 275 morts) et prostatique (8 876 morts). Chez la femme en 2012 il était en 2ème position (8 623 morts) après le cancer du sein (11 886 morts) et devant le cancer colorectal (8 447 morts). "En 2015, pour la 1ère fois, la mortalité par cancer du poumon chez la femme va dépasser en Europe la mortalité par cancer du sein, souligne le communique de presse du CHU de Nice. En France cette situation sera atteinte chez les femmes en 2022."