Loi santé : Marisol Touraine dévoile les grandes lignes
Généralisation du tiers payant, médecin traitant pour les enfants, nouveau numéro d'appel pour joindre les médecins 24h/24 : voici les principales mesures annoncées ce jeudi par la ministre de la Santé dans le cadre de la future loi de santé publique.
C'est pour que "tous les Français" aient accès à un service de santé "d'excellence" que Marisol Touraine annonce ce jeudi les orientations retenues pour la future loi de santé. Avec comme priorités : la réduction des inégalités dans l'accès à la prévention et aux soins, l'innovation, le renforcement du droit des malades. Voici d'ores et déjà les premières mesures concrètes :
Plus besoin d'avancer les frais chez le médecin. Lorsque vous achetez vos médicaments en pharmacie, vous avez la possibilité de bénéficier du tiers payant. Ce dispositif sera bientôt étendu aux consultations médicales. Ainsi, pour faciliter l'accès aux soins, les patients n'auront plus à avancer d'argent lors d'une consultation chez le médecin. "Dès l'an prochain, les bénéficiaires de l'aide à la complémentaire santé seront ainsi dispensés d'avance de frais", a annoncé Marisol Touraine. Après les plus modestes, la mesure sera étendue à "tous les assurés" d'ici 2017. Contestée par des syndicats de médecins, cette décision ne changera "en rien" l'exercice des médecins et la manière dont ils conçoivent leurs relations avec leurs patients, a précisé la ministre de la Santé, coupant ainsi court à toute contestation. "Les Français ne sont pas irresponsables", a-t-elle de plus précisé à l'intention de ceux qui craignent une explosion du recours aux soins.
Un numéro unique pour joindre les médecins. Parce que l'argent n'est pas la seule barrière à l'accès aux soins, les Français doivent aussi pouvoir trouver un professionnel de santé près de chez eux et à tout moment, par exemple pour faire face à la poussée de fièvre d'un enfant au milieu de la nuit ou encore pour trouver un médecin un dimanche après-midi. La ministre propose donc la mise en place d'un numéro d'appel unique à trois chiffres "dans chaque département" pour pouvoir joindre un médecin 24 heures sur 24.
Un médecin traitant pour les enfants aussi. Jusqu'à présent, seuls les plus de 16 ans avaient obligation de choisir un médecin traitant. Le projet de loi sur la santé revoit le parcours de soin des mineurs âgés de 0 à 16 ans. Et impose aux parents l'obligation de déclarer un médecin traitant pour leur progéniture, qu'il s'agisse d'un généraliste ou d'un pédiatre. Une idée qui est loin de faire l'unanimité.
Priorité à la prévention, à l'école et en famille. Parce que c'est à l'école que "tout se joue", Marisol Touraine va instaurer avec Benoit Hamon, un parcours éducatif en santé. "Il permettra à tous les enfants, de la maternelle au lycée, d'acquérir des connaissances en santé et d'adopter les bons réflexes. Il ne s'agit pas d'avoir une heure de cours par-ci, par-là sur la santé. Il s'agit que les enjeux de santé imprègnent le contenu de tous les enseignements." La ministre n'a pas manqué de rappeler qu'en classe de CM2, les enfants d'ouvriers sont dix fois plus touchés par l'obésité que les enfants de cadres. "C'est parmi eux que se recruteront les futures victimes de la "diabésité", cette épidémie silencieuse qui progresse de façon massive", a-t-elle encore précisé. Et comme les bons réflexes s'acquièrent aussi en famille, la ministre de la Santé se prononce de nouveau en faveur d'un outil permettant de "rendre compréhensible une information, aujourd'hui trop complexe, sur la qualité nutritionnelle des produits alimentaires industriels". Ce projet, proposé sous la forme de logos avec des codes couleurs en fonction de la qualité nutritionnelle des produits alimentaires avait été lancé par le Pr Serge Hercberg, et soutenu par de nombreuses associations de santé et de consommateurs. "De nombreuses marques m'ont fait part de leur intérêt pour une telle démarche. Il nous faut faire aboutir la réflexion sur ce que pourra être cet outil", a indiqué la ministre, sans donner davantage de précisions.
Protéger les jeunes des addictions. Autre moment clé, en matière de prévention : l'adolescence. "Nous devons mieux protéger notre jeunesse contre les addictions", a ainsi déclaré Marisol Touraine. "Je n'accepte pas que l'adolescence soit si souvent l'âge de l'entrée dans le tabac. A 17 ans, un jeune sur trois fume tous les jours ; un sur deux en mourra." Et rappelant que chaque année, le tabac tue 73000 personnes en France, la ministre a indiqué souhaiter s'engager "pleinement" dans cette bataille contre le tabac, sans préciser toutefois la nature des mesures à prendre contre le tabagisme. Réponse prochainement lors de la présentation du programme national de réduction du tabagisme.
Actions groupées contre les labos. La loi va aussi favoriser la mise en place d'actions de groupe pour les patients victimes de dommages médicaux dus à leurs traitements. Selon la ministre de la Santé, "les indemnisations y seront, certes, déterminées de manière individuelle, mais désormais nos concitoyens ne seront plus seuls face à la puissance de certaines industries", a-t-elle ajouté.
Réforme à l'hôpital. Sollicité dans le plan d'économies du gouvernement à hauteur de deux milliards pour la rationalisation des dépenses et d'un milliard d'euros via des séjours raccourcis, l'hôpital sera aussi au coeur de cette réforme. Marisol Touraine veut "changer les pratiques" et "pousser à la coopération" entre acteurs du privé et du public, avec pour objectif de repenser le parcours de soins autour du patient, en relançant par exemple l'utilisation du carnet de santé informatique.