Quel impact sur la vie quotidienne pendant et après les traitements du cancer ?

Une vaste enquête menée auprès de plus de 4000 personnes s'est penchée sur les difficultés rencontrées quotidiennement par les personnes touchées par le cancer.

Quel impact sur la vie quotidienne pendant et après les traitements du cancer ?
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Aujourd'hui en France, ce sont 3 millions de personnes qui sont ou ont été concernées par le cancer. Certes les perspectives de guérison et de survie à long terme évoluent favorablement pour un certain nombre de cancers. Toutefois, le cancer reste une véritable épreuve, tant physique que psychologique. Et même une fois le combat contre le cancer remporté, il faut gérer les effets secondaires de la maladie et des traitements, mais aussi la reprise de la vie quotidienne. En effet, il n'est pas rare que les personnes plongent dans la dépression quand elles se retrouvent livrées à elles-mêmes dans la vie réelle. Et puis il y a cette épée de Damoclès au-dessus de la tête qui rend l'après cancer difficile à vivre : les personnes doivent composer pendant plusieurs années avec le risque de rechute et les contrôles médicaux réguliers.

C'est pour mieux connaître et comprendre ces difficultés que l'Institut national du cancer (Inca) a réalisé cette enquête en partenariat avec l'Inserm. 
Annonce du diagnostic : un moment crucial. L'enquête VICAN2 aborde ainsi les différentes facettes de la vie des personnes atteintes d'un cancer et en premier lieu les circonstances du diagnostic. "Nommer la maladie est crucial parce qu'il s'agit de la première étape d'une relation thérapeutique au long cours", rappellent les auteurs du rapport. Et de fait, l'annonce du diagnostic était une priorité du premier plan cancer (2003-2009). Près de dix ans après, 89 % des personnes interrogées se sont bien fait confirmer leur diagnostic en face à face, lors d'une vraie consultation. Mais 13,4 % des malades ont encore appris la terrible nouvelle au laboratoire d'analyses ou au centre de radiologie, et 1,6 % par courrier. De plus, malgré les progrès réalisés, l'annonce du diagnostic est encore perçue comme "trop brutale" par 18 % des enquêtés. L'enquête explore aussi les échanges entre les soignants et les malades. Et bonne nouvelle, c'est beaucoup mieux : les proportions de personnes estimant que l'information donnée par les soignants était trop importante ou trop complexe ont toutes notablement baissé dans cette nouvelle enquête, comparativement à 2004. Un tiers seulement des personnes interrogées juge avec le recul des deux ans que l'équipe médicale n'avait peut-être pas toujours assez de temps pour répondre à leurs questions et un tiers que les informations qu'on leur donnait étaient soit trop compliquées soit qu'ils ne savaient pas eux-même comment poser leurs questions.
Vies privées et professionnelles impactées. L'enquête VICAN2 illustre par ailleurs la dégradation générale de la qualité de vie induite par le cancer. Les patients décrivent une fatigue majeure et persistante, de l'anxiété et des douleurs fréquentes. Un mal-être physique et psychique qui persiste, même une fois les traitements passés. Et curieusement, la proportion de femmes qui jugent, deux ans après le diagnostic, vivre avec une qualité de vie physique dégradée est plus importante qu'en 2004 (55,8 % contre 45,9 %). Aujourd'hui, si les progrès thérapeutiques sont indéniables, la question de la prise en charge globale des patients semble donc plus que jamais nécessaire. D'ailleurs selon le baromètre cancer 2013 réalisé par l'Institut Curie, les médecines dites complémentaires, comme la sophrologie, le yoga ou l'hypnose, sont de plus en plus reconnues et plébiscitées pour leur capacité à améliorer la qualité de vie des patients, en particulier pour soulager certains effets secondaires des traitements. Autre question abordée par l'enquête : la vie de couple. Elle semble préservée puisque deux ans après le diagnostic, 84 % des hommes et 69 % des femmes vivent toujours avec la même personne. En revanche, la sexualité est visiblement mise de côté. Plus de la moitié des patients se plaignent d'une baisse de la libido (voire de sa disparition pour 22 %). Ainsi, la moitié des hommes a moins de rapports sexuels qu'avant (41 % des femmes). Fatigue et baisse de l'estime de soi sont des raisons évoquées par le rapport pour expliquer cette baisse de désir dans les couples. Quant à l'impact sur la vie professionnelle, il est indéniable. Au moment du diagnostic, huit personnes sur dix avaient un emploi, contre six sur dix, deux ans plus tard. Une perte d'emploi qui touche davantage les moins diplômés, les ouvriers, les employés, les plus jeunes et les plus âgés. La gravité du cancer aggrave aussi les inégalités puisque, pour un cancer de bon pronostic, le taux de maintien de l'emploi deux ans après le diagnostic est de 89 % pour les cadres et 74 % pour les ouvriers et employés, contre respectivement 48 % et 28 % pour les cancers de mauvais pronostic. Une personne interrogée sur dix, en particulier les femmes et les jeunes, déclarede plus avoir fait l'objet d'attitudes de rejet ou de discriminations directement liées à leur maladie.
Le poids des inégalités. Le cancer aggrave les inégalités sociales et en France le cancer reste la maladie la plus inégalitaire. Ainsi, l'accès à la prévention et au diagnostic est plus difficile pour les catégories les moins favorisées socialement. Conséquence : au moment du diagnostic, les ouvriers et les salariés présentent des cancers plus graves que les cadres ou les professions libérales.