Cœur artificiel : le patient greffé se porte bien
Retour à la vie "normale" pour le patient greffé en août dernier d’un cœur artificiel. L'homme de 68 ans est rentré chez lui il y a quelques jours.
Miracle ou exploit médical ? Le patient greffé du cœur avec une prothèse artificielle a pu rentrer chez lui début janvier apprend-on ce lundi. "Il se porte bien et a quitté l’hôpital en début d’année", peut-on lire dans un communiqué de la société Carmat, qui a conçu et développé le cœur artificiel "le plus avancé au monde". Interrogé par le Parisien, le Pr Alain Carpentier, le père de cette prothèse novatrice, qui est aussi le co-fondateur de Carmat, parle de "miracle" et évoque non sans émotions les progrès fulgurants réalisés par son patient : "le plus incroyable, c’est la qualité de vie et l’autonomie qu’il a retrouvées. Il y a trois semaines, j’ai passé une demi-journée avec lui, avant qu’il ne sorte de l’hôpital de Nantes. C’était une expérience bouleversante pour le médecin que je suis, habitué à côtoyer des malades souffrant d’insuffisance cardiaque [la maladie cause, à un stade avancé œdèmes des jambes et des essoufflements, ndlr]. Cinq mois après son opération, j’ai découvert un homme qui marche mieux que moi ! […] Il a enfourché son vélo d’appartement pour me surprendre."
Implanté au CHU de Nantes d’un cœur bioprothétique Carmat, le 5 août dernier, le patient de 68 ans, dont l’identité n’a pas été révélée, serait donc en bonne santé. Selon la société Carmat, il aurait bénéficié d’une formation au fonctionnement du boitier qui l’accompagne désormais. Ce système "portable, électrique et silencieux" permet en effet d’alimenter et de surveiller sa prothèse. "C'est le plus léger de tous les dispositifs disponibles pour l'alimentation d'un cœur artificiel total. Il offre aux patients mobilité et autonomie dans d'excellentes conditions", précise encore le communiqué. La suite ? Quatre autres patients attendent d’être implantés afin de tester la sécurité de la prothèse. Une deuxième tranche d’expérimentations devrait porter sur une vingtaine de patients et se concentrer sur le confort et la qualité de vie, selon des indications fournies l'an dernier par la société.
Les prothèses artificielles, un espoir pour les patients insuffisants cardiaques. Face à la pénurie de greffons, les prothèses cardiaques pourraient présenter une alternative médicale intéressante. D’autres cœurs artificiels ont déjà été implantés sur des patients par le passé ailleurs dans le monde, mais seulement provisoirement, en attendant une greffe cardiaque. La prothèse Carmat aurait quant à elle vocation à remplacer totalement et définitivement le cœur biologique. En outre, la prothèse ne nécessiterait pas de traitements anti-coagulants lourds pour éviter la formation de caillots sanguins. D'autres alternatives sont également étudiées. Ainsi, vendredi dernier, c'était l'équipe du professeur Philippe Menasché (hôpital Georges-Pompidou à Paris) qui annonçait une autre première mondiale française : l'implantation dans le coeur malade d'une femme de cellules souches d'origine embryonnaire.
Le premier greffé est décédé. En mars dernier, le premier patient à avoir bénéficié de la première implantation de cœur artificiel Carmat, était décédé 75 jours après l’intervention à hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP). Selon le Pr Carpentier interrogé par le Parisien, "les causes de l'arrêt au 74e jour se sont révélées multifactorielles" et "une part des difficultés étaient liées à la condition même du malade : son âge, sa maladie plus avancée, sa vie menacée à quelques semaines" et "son état général, rénal en particulier, plus atteint que ce que nous pouvions supposer". Pour la deuxième opération, "nous avons choisi un malade plus jeune, aux fonctions rénales et hépatiques encore peu atteintes, et avec une bonne fonction pulmonaire".
Le titre de la société Carmat grimpe en bourse. L’annonce du retour chez lui du patient greffé a été bien accueilli à la Bourse de Paris : l’action s’est envolée en bourse ce lundi, relèvent plusieurs quotidiens. De quoi faire oublier une enquête sur le business des prothèses médicales, diffusée par France 2 en septembre dernier dans le magazine Envoyé Spécial. L’enquête réalisée peu de temps après la première greffe émettait des doutes quant au caractère novateur de cette avancée scientifique, dont la communication est assurée par la société Carmat elle-même. Selon les journalistes, celle-ci aurait notamment surestimé le marché lié à cette prothèse afin de protéger son cours en bourse. Mais, quelques jours plus tard, Carmat avait réfuté, point par point, les accusations.